Exclusif : Deux morts dans l'étude sur le baclofène
Selon nos informations, deux patients participant à l'étude sur le baclofène sont décédés. Démarrée au mois de mai 2012 l'étude "Bacloville", dirigée par le Pr Jaury a pour but de tester l'efficacité du baclofène dans le sevrage alcoolique. L'étude propose d'évaluer l'efficacité à un an de traitement, comparé au placebo, sur des patients ayant une consommation d'alcool à faible niveau de risque ou nulle, selon les normes de l'OMS. Concrètement, sur une cohorte de 304 patients, la moitié reçoit le baclofène tandis que l'autre moitié reçoit un placebo.
Plusieurs sources concordantes impliquées dans l'étude Bacloville nous ont affirmé que le baclofène est responsable de nombreux effets indésirables chez les patients. "Nous avons notamment constaté de nombreuses chutes", nous a expliqué une de ces sources. Mais depuis le lancement de l'étude Bacloville, "il y a eu aussi deux décès. L'équipe a donc levé l'aveugle sur ces deux cas. Mais pour l'instant, il est encore difficile d'établir exactement la cause de ces décès", toujours selon cette même source. Autrement dit, l'anonymat pour savoir à quel groupe appartenaient les morts a été levé et il semblerait qu'"ils étaient inclus dans le groupe traité par le baclofène".
Bien que ces révélations jettent le doute, il est impossible pour l'heure d'incriminer le baclofène. La population alcoolique est une population très complexe et fragile tant physiquement que psychiquement : le baclofène peut entraîner des effets secondaires tels qu'une grande fatigue, une somnolence pendant la journée, des chutes, et un risque suicidaire.
Le Pr Jaury quant à lui ne confirme pas ces propos. "Tout ce que je peux dire c'est que l'étude se passe très bien. On ne peut rien dire de plus. Il faut respecter le temps de l'étude. On nous a demandé des études, on les fait. Personnellement, je n'ai demandé aucune levée d'aveugle. Que l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) l'ait demandé, c'est son droit. S'il y a des problèmes, l'étude sera arrêtée mais ce n'est pas le cas actuellement. C'est une étude pragmatique, ce sont de vrais malades, il ne s'agit pas de malades sélectionnés qui n'ont pas de comorbidité ou qui n'ont pas de problèmes."
À l'origine, le baclofène est un décontractant musculaire prescrit depuis 1974 et détourné de son usage officiel en vue de réduire la consommation d'alcool. Ce médicament a été popularisé par le Dr Ameisen dans son livre "Le dernier verre", paru en 2008. Ce médicament est aujourd'hui utilisé par 30.000 à 50.000 personnes en France souffrant d'alcoolo-dépendance. N'ayant pas d'autorisation de mise sur le marché pour cette indication l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a lancé l'étude Bacloville. Aujourd'hui, cette étude qui est financée à hauteur de 1,3 millions d'euros par la Sécurité sociale et un mécène qui souhaite rester anonyme est toujours en cours. Si le lien entre la prescription de baclofène et le décès des patients est directement établi, cela relancera la polémique sur l'utilisation des médicaments en dehors de leur indication initiale.
Rudy Bancquart
En savoir plus
Sur Allodocteurs.fr :
A lire aussi :
- Diane 35® : le détournement de médicaments
- Diane 35® suspendue du marché français
- Accouchement : mise en garde contre une utilisation hors AMM
- DMLA : interdiction du médicament le moins cher
- Le Rivotril® sous surveillance
- Restrictions sur le Rivotril® : quelles conséquences pour les patients ?
- Les médicaments en questions