Non, la maladie de Charcot n'est pas causée par des bactéries !
● FAUX – Atteint de la maladie de Charcot (sclérose latérale amyotrophique, ou SLA), l'ex-tennisman Jérôme Golmard a lancé un appel aux dons pour pouvoir bénéficier d'un traitement coûteux en Allemagne, destiné à "détruire les bactéries à l'origine de la maladie". Les spécialistes de la maladie de Charcot s'étranglent : les infections bactériennes sont hors de cause dans la SLA, et le thérapeute qui prétend pouvoir prendre en charge Jérôme Golmard se réfère à des théories médicales réfutées depuis plus de trente ans.
Ancien joueur de l'équipe de France de tennis, Jérôme Golmard a été diagnostiqué mi-janvier 2014 de la maladie de Charcot (SLA). Cette pathologie entraîne la dégénérescence des cellules nerveuses qui transmettent les informations motrices du cerveau vers les muscles. À mesure que la maladie évolue, les muscles qui ne sont plus stimulés s'atrophient, et les activités simples comme le langage, la marche, les mouvements des mains, ou la déglutition deviennent difficiles, voire impossibles.
Selon une page d'information (et de récolte de fonds) créée par un collectif de soutien au sportif, afin qu'il puisse bénéficier d'un traitement en Allemagne, "les premiers symptômes se sont déclarés à la suite de l'arrachement de dents de sagesse qui sont la cause de l'infection actuelle et de la bactérie qui s'est propagée à grande vitesse."
"C'est absolument n'importe quoi", se désole le professeur Vincent Meininger, spécialiste français de la maladie de Charcot. "Toutes les études qui ont été menées n'ont jamais montré le moindre lien entre des bactéries et la SLA, ni avec la maladie de Lyme... Il n'y a pas de relation ! La recherche montre qu'une SLA a des causes multiples, et qu'entre la cause initiale et le développement de la maladie, il se passe entre 20 et 40 ans ! Ce que l'on sait, en revanche, c'est que certaines interventions peuvent révéler l'existence de la maladie. Mais elles ne sont absolument pas la cause de la SLA. C'est absolument n'importe quoi !"
Le douteux professeur Lechner
Jérôme Golmard pense avoir trouvé une possible thérapie à sa SLA auprès d'un chirurgien dentiste allemand, Johann Lechner, qui prétend "avoir découvert 14 foyers infectieux sous les dents et dans l'os de sa mâchoire", peut-on lire sur la page de soutien au tennisman. Ce diagnostic aurait été "réalisé par le biais d'une machine à ultrasons qui permet de détecter les bactéries responsables de scléroses de ce type". "Il semble que si le docteur arrive à désinfecter ces zones et à tuer ces bactéries à leur source il pourrait stopper la prolifération de cette bactérie dans le corps de Jérôme", peut-on encore lire sur la page de soutien. "Quatre opérations chirurgicales seront nécessaires pour arriver à désinfecter toutes les zones et traiter les 14 points source."
Ces opérations, non remboursées par les assurances, sont facturées 300.000 dollars par leur promoteur, Johann Lechner. Ce dernier est un spécialiste autoproclamé de la "névralgie induite par la nécrose des cavitations" (Neuralgia-inducing cavitational osteonecrosis, ou NICO). A l'origine, cette NICO est une hypothèse médicale (proposée en 1976 sous le nom d'"ostéopathie cavitationnelle"), selon laquelle certaines paralysies trouveraient leur origine dans le développement de bactéries dans des cavités de la mâchoire. Toutes les études rigoureuses menées pour tester cette hypothèse n'ont jamais pu la valider.
Aux Etats-Unis, de nombreux procès ont été intentés par des patients victimes de chirurgiens-dentistes ayant entrepris de coûteuses opérations destinées à les guérir – toujours en vain – de diverses maladies. Sur sa page consacrée aux NICO, le site anglophone de référence Quackwatch (qui recense les cas de fraudes médicales et informe le grand public les pratiques relevant de la charlatanerie) adresse un message clair aux patients : "Si vous vous trouvez dans le cabinet d'un dentiste qui vous déclare qu'une maladie systémique ou des douleurs bien loin de votre bouche sont dues à une infection de cavités dans votre mâchoire, prenez vos jambes à votre cou et trouvez un autre dentiste !"
En savoir plus sur la SLA
Sur Allodocteurs.fr :
Ailleurs sur le web :
- Association pour la recherche sur la sclérose latérale amyotrophique et autres maladies du motoneurone (ARSLA)
L'association ARSLA réunit les familles de malades et les spécialistes de la maladie.
- Portail de la coordination des centres et des réseaux de prise en charge de la SLA
Listes des centres et réseaux SLA.
- Orpha.net
Fiche d'information sur la SLA.