Parabènes : des effets sur la croissance des garçons

L'exposition des femmes enceintes à certains antibactériens et conservateurs présents dans des produits cosmétiques ne serait pas sans effet sur le développement fœtal ou sur la croissance ultérieure de l'enfant. Selon les résultats d'une étude française, publiée le 2 septembre 2014 dans la revue Epidemiology, des variations du périmètre crânien du fœtus ou du poids des bébés semblent liées à de telles expositions.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Des épidémiologistes grenoblois ont recruté, entre 2003 et 2006, plusieurs centaines de femmes enceintes, dont ils ont cherché à évaluer l'exposition à diverses substances chimiques (triclosan, parabènes) par analyse de leurs urines. Les analyses ont montré que 95% des femmes avaient été exposées à ces substances, mais à des doses très variables.

L'étude publiée ce 2 septembre se concentre sur 520 femmes ayant donné naissance à des garçons. Ceux-ci ont été suivis jusqu'à l'âge de 3 ans.

Les chercheurs ont mis en comparaison les taux des différentes substances chimiques présents dans un échantillon d'urine unique (prélevé au moment du recrutement des mères) avec des mesures de la circonférence crânienne, de la circonférence abdominale, du poids et de la taille des fœtus et enfants.

En dépit de l'instabilité des composés chimiques évalués et d'un travail réalisé sur un unique échantillon d'urine, quelques effets nets ont pu être observés par les chercheurs.

Quels effets ont été mesurés ?

Ainsi, le 2,4-dichlorophénol (présents dans certains herbicides) est associée à une plus faible circonférence abdominale du fœtus durant le dernier trimestre de grossesse, et à un tour de taille et un poids plus prononcés chez les mêmes enfants à l'âge de 3 ans. Ce phénomène est également très net pour les enfants de mères exposées aux parabènes de type méthylparaben et éthylparaben (conservateurs utilisés dans certains cosmétiques et médicaments).

Toujours selon les données de l'étude, l'exposition au triclosan (antibactérien présent dans certains textiles et des produits cosmétiques et d'hygiène personnelle tels que des dentifrices) et aux propylparabens (conserateurs présents dans divers shampooings et produits de bains) sont pour leur part associés à des fœtus de plus fort poids durant le troisième trimestre de grossesse.

Enfin, le 2,5-dichlorophénol (qui a longtemps été présent dans des désodorisants d'intérieur, mais est désormais bien moins utilisé) apparaît influer sur la circonférence crânienne du fœtus, là encore durant le dernier trimestre de grossesse.

Quelles conséquences ?

D'un point de vue épidémiologique, une prise de poids accélérée dans les premières années de la vie peut être associée à un risque accru d'obésité à l'âge adulte, tandis qu'un retard de croissance du périmètre crânien est susceptible d'avoir un impact sur le développement du cerveau.

"Mais il faut être très prudent quant à l'interprétation" a averti Rémy Slama, le chercheur qui a coordonné l'étude, lors de la publication des données. Il souligne qu'il s'agit d'une des toutes premières études étudiant l'impact des "contaminants environnementaux" sur la croissance de l'enfant pendant et après la grossesse.

Il relève néanmoins que "l'effet prise de poids est cohérent avec des études de toxicologie faites sur des tissus gras en laboratoire".

Quid du Bisphénol A ?

Aucune conclusion n'a en revanche pu être tirée, dans le cadre de cette étude, sur le bisphénol A. Les taux de cette substance ont également été mesurés par un échantillon urinaire unique, alors que sa persistance dans l'organisme est très courte et qu'il peut fluctuer plus fortement encore que le triclosan et les parabènes.

Au regard des limitations de ces travaux, l'équipe de Rémy Slama envisage désormais de suivre un nombre plus important de femmes, de façon plus étroite.

 

Source : Prenatal Exposure to Phenols and Growth in Boys. C. Philippat et coll. Epidemiology, sept. 2014. doi:10.1097/EDE.0000000000000132

 

En savoir plus sur les perturbateurs endocriniens : 

 

Les perturbateurs endocriniens se définissent comme des substances susceptibles d'interfèrer avec le système hormonal humain (parfois, alors même qu'elles ne sont présentes qu'à très faibles doses). Ces perturbateurs endocriniens ou hormonaux sont suspectés d'avoir un impact sur la fertilité et de contribuer à une augmentation du nombre de certains cancers hormono-dépendants.