Personnes âgées à domicile : les difficultés du médecin généraliste
La Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES) pointe la complexité des médecins généralistes à prendre en charge les personnes âgées dépendantes vivant à domicile, dans un rapport publié ce 18 février 2014. Le médecin de famille, acteur primordial de prise en charge de cette population, tente tant bien que mal de faire face à ses nombreuses missions (médicale, psychosociale) pour maintenir l'autonomie de ses patients âgés vivants à domicile.
Une prise en charge globale à assumer par le médecin généraliste
Le médecin généraliste est placé aux premières loges pour prendre en charge globalement les personnes âgées dépendantes vivant à domicile. Il est confronté à de nombreuses difficultés face à cette population vieillissante.
Outre les actes médicaux qu'il effectue - comme il le fait avec le reste de sa patientèle - le médecin de famille doit s'occuper de toute la coordination de leurs soins. Les personnes âgées vivant à domicile ont quasiment toutes besoin d'aides ménagères, d'infirmiers à domicile, de séances de kinésithérapie et d'aides à la toilette, parfois même de façon permanente.
Cette complexité de prise en charge a été pointée par la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees) dans un rapport qu'elle vient de publier.
Une consultation complexe et multidisciplinaire
La quasi-totalité des praticiens interrogés dans l'étude déclare suivre au moins une personne âgée dépendante vivant à domicile et près de 40% d'entre eux en suivent au moins vingt. Ces patients ne peuvent souvent plus se déplacer et le médecin est la plupart du temps contraint de se rendre à leurs domiciles.
84% des prises en charge de ces personnes dépendantes décrites par les médecins de l'étude correspondent à des visites à domicile. Sans compter le déplacement, la consultation à domicile est en moyenne beaucoup plus longue (25 minutes) qu'une consultation en cabinet (23 minutes) ou pour le reste de leur patientèle (18 minutes en moyenne).
Cela s'explique par la complexité des pathologies des personnes âgées atteintes de maladies chroniques ou d'autres affections aiguës. Les chutes accidentelles représentent un facteur net d'aggravation de la dépendance des personnes âgées. Pour éviter ces chutes, le médecin prend le temps d'expliquer des conseils de prévention à son patient, ce qui majore le temps qu'il lui consacre.
75% des médecins interrogés déclarent donner des conseils nutritionnels et 69% d'entre eux tentent de corriger les facteurs iatrogènes (automédication).
Le médecin généraliste dépasse son rôle de soignant
D'après l'enquête Handicap-Santé, 98% des personnes âgées dépendantes font appel au moins une fois dans l'année à un médecin généraliste. Leur prise en charge par le médecin généraliste ne s'arrête pas à des soins médicaux.
Une fois l'ordonnance renouvelée et les conseils de prévention de chutes donnés, le médecin s'attelle à la gestion des prestations paramédicales (infirmiers libéraux, aides-soignants, kinésithérapeutes, apports des repas à domicile, aides à la toilette, aides ménagères) et administratives (par exemple, demande d'une allocation personnalisée d'autonomie), pour favoriser le maintien à domicile.
La majorité des personnes âgées dépendantes, vivant à domicile, comptent d'ailleurs souvent sur leur médecin ou leur entourage pour entreprendre ces démarches longues et fastidieuses. Le médecin contacte l'entourage (quand il y en a un) afin qu'il puisse à son tour mettre en place les aides nécessaires.
A défaut, il s'en charge lui-même. D'après l'enquête de la Drees, la majorité des médecins interrogés (59%) déclarent téléphoner eux-mêmes aux aidants pour assurer la continuité des soins.
Le manque de disponibilités d'infirmiers ou d'aides soignants libéraux dans certaines régions majore la difficulté de prise en charge de ces patients où le médecin dépasse parfois même sa mission de soignant et intègre une dimension sociale et environnementale à son exercice.
Le temps passé pour cette gestion, cumulé au temps de déplacement et de la consultation peut parfois dépasser une heure pour la prise en charge d'une personne âgée. 12% des médecins de l'étude considèrent qu'une coordination de l'ensemble des acteurs est nécessaire et 82% seraient prêts à s'en occuper moyennant une rémunération.
Un projet de loi oubliant les médecins
Inquiet du vieillissement de la population, des structures hospitalières qui débordent et des déserts médicaux, le gouvernement a annoncé un nouveau projet de loi pour favoriser le maintien à domicile des personnes âgées. Le texte sera présenté le 9 avril 2014 en Conseil des ministres.
Parmi les mesures proposées, le gouvernement annonce une revalorisation de l'APA, des aides pour adapter les logements, donner un "nouveau souffle" aux foyers logements, reconnaître le rôle des aidants en créant une aide au "répit", développer un plan de prévention du suicide chez les personnes âgées.
Et les médecins généralistes dans tout ça ?
Source : La prise en charge en médecine générale des personnes âgées dépendantes vivant à domicile. Février 2014. Dress.
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