Pilules : beaucoup de victimes ?
Risques liés aux pilules : que signifient les chiffres ? Différents types de contraceptifs sont, depuis plusieurs mois, au cœur d'une vive polémique. Relayant des données de pharmacovigilance diffusées par l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), les médias dénombrent les cas d'hospitalisations ou de décès associés à telle ou telle génération de pilule, sans toujours mettre ces données en perspective.
La polémique sur les risques associés à l'utilisation de certains contraceptifs s'accompagne d'une avalanche de chiffres… pas toujours digestes. Pour mieux estimer les nombreuses données au cœur du débat, il convient de prendre quelques points de comparaison.
Les effets non désirés potentiellement associés à la prise de médicaments sont évalués au cours d'essais cliniques. La survenue de tous troubles, chez les personnes utilisatrices de la préparation testée, est dûment consignée. Ces données permettent d'estimer la probabilité de survenue d'un symptôme chez les futurs consommateurs. Cette fréquence d'apparition peut être importante (effet indésirable fréquent) ou très faible (effet indésirable rare).
Combien d'accidents thromboemboliques veineux ?
Les accidents thromboemboliques veineux (ATV) sont des évènements rares chez les femmes non utilisatrices de pilule : annuellement, la fréquence est estimée à un peu moins de 10 cas pour 100.000 femmes (1). La probabilité de survenue d'un tel trouble n'est cependant pas uniforme dans la population, et la fréquence de ces accidents est considérablement augmentée auprès de populations en surpoids, consommant du tabac ou diagnostiquées pour un cancer. Selon les données épidémiologiques actuelles, les thromboses veineuses surviennent annuellement chez 60 femmes sur 100.000 au cours de la grossesse.
Concernant les femmes utilisatrices de contraceptif de seconde génération, la fréquence annuelle d'ATV est aujourd'hui estimée à 20 cas sur 100.000. Dans le cas des pilules de troisième et quatrième génération, la fréquence annuelle d'ATV est estimée entre 30 et 40 cas pour 100.000 utilisatrices. S'il est tout à fait juste de dire que le risque d'ATV est respectivement "doublé" et "quadruplé" par la prise de ce type de contraceptif, il convient donc de rappeler que le risque initial est faible. Et de noter que ce risque est inférieur à celui qu'encourt toute femme au cours d'une grossesse.
Combien de décès ?
Un ATV est un événement grave, qui peut conduire à de nombreuses complications qui laissent parfois des séquelles importantes. Dans de rares cas, l'ATV peut entraîner le décès.
Plus d'une Française sur deux (55 %) utilise aujourd'hui un contraceptif oral. Le nombre de décès par AVC recensés par l'ANSM, directement imputables à l'utilisation de pilules (toutes générations de contraceptifs confondues) s'élève à 13 victimes recensées sur 28 ans (soit moins d'un cas par an). Douze de ces treize utilisatrices présentaient des facteurs de risques préalables.
À titre de comparaison, les données de l'ANSM associées au seul antiacnéïque Diane 35® (prescrit à des fins contraceptives malgré l'absence d'autorisation de mise sur le marché pour cette utilisation) font état de 4 décès confirmés sur 26 ans. En 2012, 315.000 femmes étaient utilisatrices de Diane 35®.
Les chiffres dont dispose l'ANSM sont cependant très dépendants de la rigueur avec laquelle les cas d'ATV associés à la prise de contraceptifs lui ont été transmis par les professionnels de santé au fil des ans. Ainsi, mi-janvier, un hôpital universitaire français révèlait que sur 47 accidents vasculaires (thromboses, embolies, accidents cérébraux) consécutifs à la suite d'une prise de pilule survenus sur une période de 14 ans (dont deux ayant entraîné un décès), seuls trois avaient été signalés aux autorités (aucun n'étant relatif au décès). Cet exemple ne permet cependant pas, à lui seul, d'estimer dans quelle proportion le risque associé à la prise de différentes pilules peut être réévalué.
Quels risques d'AVT sont associés aux autres moyens de contraception ?
Tous les contraceptifs hormonaux à base d'œstrogènes augmentent le risque de thrombose veineuse. Une étude récente, déjà évoquée sur notre site, estime que le risque d'ATV associé à l'utilisation un patch transdermique est 7,9 fois supérieur à celui associé aux femmes n'utilisant pas de contraceptif (soit environ 79 cas annuels pour 100.000 utilisatrices). Dans le cas d'un anneau vaginal, le risque serait multiplié par 6,5 (environ 65 cas annuels pour 100.000).
(1) Source : ANSM
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