Pradaxa® : l'affaire est classée sans suite par le parquet de Paris
Le parquet a classé sans suite la plainte de familles de personnes âgées décédées après avoir pris l'anticoagulant de nouvelle génération (NACO) Pradaxa®, selon une annonce de l'avocat des plaignants, le 26 mars 2014, confirmant une information de RTL.
Il a suffit de quatre mois d'enquête pour que le pôle Santé du parquet de Paris classe sans suite le dossier Pradaxa®, un anticoagulant de nouvelle génération, provoquant une "énorme déception" chez les familles des victimes, d'après une information diffusée par RTL. Selon une source judiciaire, une des plaintes a été classée car "les éléments étudiés par le pole Santé n'ont pas du tout mis en évidence, voire ont écarté une imputabilité du décès à l'administration de cet anti-coagulant". Me Philippe Courtois, avocat des plaignants, a répondu que ses clients allaient en conséquence déposer une nouvelle plainte, avec constitution de partie civile, pour obtenir la désignation de juges d'instruction malgré ce classement par le parquet de Paris.
L'affaire du Pradaxa® a commencé en octobre 2013, lorsque les familles des quatre personnes âgées décédées qui prenaient cet anticoagulant ont porté plainte pour homicide involontaire contre le laboratoire allemand Boehringer Ingelheim le commercialisant. Les plaignants visaient également l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM, ex Afssaps), à qui ils reprochent d'avoir méconnu les principes de précaution et de prévention sur le risque hémorragique que provoquerait ce médicament.
Des risques hémorragiques connus
Pourtant, l'ANSM avait émis une mise en garde sur cette nouvelle classe d'anticoagulants apparus sur le marché en 2008 dans l'Hexagone, prescrits dans un premier temps pour prévenir les risques de thromboses (caillots de sang) après une opération de la hanche ou du genou, et ce, avant le dépôt de plainte.
Depuis 2012, ces nouveaux anticoagulants sont également utilisés pour prévenir le risque d'accident vasculaire cérébral (AVC) chez les personnes souffrant de fibrillation auriculaire, un trouble du rythme cardiaque. Dans sa mise en garde, l'ANSM rappelait que les NACO présentaient des risques hémorragiques et invitait les médecins à respecter strictement les indications, notamment chez le sujet âgé, pour limiter ces risques. Environ 1,26 million de patients recevaient des anticoagulants oraux (anciens ou nouveaux) fin 2013.
5 à 10% des prescriptions non validées
Les anti-vitamines K, plus anciens, restent le traitement oral de référence. Ils nécessitent une surveillance régulière de l'activité coagulante par prélèvement sanguin et l'on dispose d'un antidote en cas d'accident hémorragique.
Ce qui n'est pas le cas des NACO - Pradaxa® (dabigatran), Xarelto® (rivaroxaban) et Eliquis® (apixaban) dont les prescriptions se sont envolées et pas toujours à bon escient, selon un point dressé par l'ANSM et l'Assurance Maladie en novembre 2013. L'Assurance maladie reconnaissait en effet que 5 à 10% des prescriptions de NACO correspondait à des indications non validées, voire dangereuses, notamment chez des patients atteints d'insuffisance hépatique ou rénale.
Elle relevait également que 10% des patients ayant débuté un traitement par NACO au dernier trimestre 2012 étaient des patients de plus de 80 ans, sans surveillance de leur fonction rénale, alors qu'il y a un risque d'accumulation et donc d'hémorragie quand les reins fonctionnent moins bien avec l'âge.
VOIR AUSSI :
- Pradaxa® : des résultats écartés d'une étude sous la pression du laboratoire ?, article du 10 février 2014.
- À quoi servent les anticoagulants ? dossier du 17 juin 2010, mis à jour le 10 octobre 2013
- Pradaxa® : l'ANSM appelle les patients à ne pas arrêter leur traitement, article du 9 octobre 2013