Un lien entre le cancer du testicule et l'aptitude à bronzer
Une mutation génétique serait impliquée à la fois dans le cancer du testicule et dans la facilité à bronzer. Cette découverte pourrait expliquer pourquoi les Causasiens sont quatre à cinq fois plus touchés par ce cancer que les Africains. Elle ouvre également la voie dans le diagnostic et le choix du traitement à donner pour combattre cette maladie. Ces résultats proviennent d'une étude scientifique publiée le 10 octobre 2013, dans la revue Cell.
Afin de mieux comprendre les mécanismes à l'origine du développement des cancers, les chercheurs sont tombés sur une découverte étonnante : un gène qui favorise le bronzage est également impliqué dans le développement du cancer du testicule.
Les chercheurs du National Institute of Health Sciences (NIH), de l'Université d'Oxford et du Ludwig Institute for Cancer Research se sont concentrés sur l'étude d'un gène qui intervient dans la régulation de la prolifération des cellules produisant les spermatozoïdes (les cellules germinales). En comparant minutieusement les séquences d'ADN, ils se sont aperçus qu'une simple mutation de la séquence de ce gène multiplie par trois le risque d'entraîner une prolifération anormale des cellules germinales et donc de provoquer un cancer du testicule.
Cancer du testicule et bronzage, une même mutation
Mais cette mutation a un second effet, bénéfique cette fois. Elle protège des dommages du soleil les personnes qui la portent. En effet, cette même variation dans la séquence de ce gène induit une augmentation de la production de mélanine des cellules de la peau lorsqu'elles sont exposées aux rayons UV. Résultat : la peau bronze plus vite, elle est mieux protégée.
Les chercheurs y voient la raison de la plus forte fréquence de cette mutation chez les Européens caucasiens (80%) que chez les Africains (24%). L'évolution tient le rôle central dans ce phénomène. Quand une cellule se divise, il arrive que des erreurs dans la réplication de l'ADN surviennent au hasard, ce sont les mutations. Lorsqu'elles ne sont pas "corrigées" par la cellule, ces erreurs sont transmises à la descendance. Si elles apportent un bénéfice pour la survie des individus, elles se retrouvent avec une forte fréquence dans la population (on parle alors de pression de sélection positive).
Justement, les populations à peau blanche possédant cette mutation se seraient vues avantagées par cette mutation car mieux protégées des rayons du soleil qui causent des lésions de la peau et de l'ADN... provoquant des cancers. Transmises au fil des générations, cette mutation s'est répandue dans la population blanche.
En revanche, cette variation ne conférant pas de bénéfice aux peaux noires, naturellement protégées, a été peu conservée au cours de l'évolution. Elle se retrouve en conséquence avec une plus faible proportion chez les Africains.
Cette découverte expliquerait par la même occasion "pourquoi le cancer du testicule est quatre à cinf fois plus fréquent chez les Caucasiens que chez les Africains", indique le Dr Gareth Bond de l'Université d'Oxford, l'un des auteurs de l'étude.
Des pistes pour le diagnostic et la thérapie
Une autre étonnante trouvaille de ces chercheurs explique pourquoi les tumeurs testiculaires sont relativement bien guéries par la chimiothérapie. La protéine qui active les gènes présentant la mutation joue aussi le rôle de suppresseur de tumeur dans les cellules. Dans 50% des cancers, cette protéine n'est plus fonctionnelle, alors que son activité est intacte pour 97% des cancers testiculaires. Une bonne nouvelle puisque l'action de cette protéine s'ajoute à celle de la chimiothérapie pour combattre le cancer.
La compréhension du rôle de cette mutation dans le risque de développer un cancer du testicule peut aider au "développement de test de prédisposition pour évaluer la probabilité pour un individu de développer un cancer du testicule. Ces tests pourraient aussi guider les médecins dans le choix du traitement à donner pour combattre le cancer, apportant par la même occasion un sérieux coup de pouce au développement d'une thérapie personnalisée du traitement de ce type de cancer", explique le chercheur.
Source : A Polymorphic p53 Response Element in KIT Ligand Influences Cancer Risk and Has Undergone Natural Selection. Cell 2013. Jorge Zeron-Medina et coll. doi : 10.1016/j.cell.2013.09.017
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