Procrastination : tout ce que vous devez faire, sans attendre...
La journée de la procrastination, c’était hier... L’auteure de ces lignes, atteinte d’une forme assez sévère du trouble, ne s’attelle au sujet qu’aujourd’hui. Elle a appelé à la rescousse le Pr Antoine Pelissolo, psychiatre. Il nous donne les clés pour faire aujourd’hui ce qu’on pourrait très bien faire demain.
Vous taillez votre crayon vingt fois avant de vous mettre au travail ? Vous êtes immanquablement pris(e) d’une envie soudaine de classer toutes vos photos de vacances avant de vous mettre à une tâche rébarbative ? Vous faites votre déclaration d’impôts, dans la précipitation, une heure avant la date butoire ? Ne cherchez pas, vous souffrez (un peu, beaucoup, ou douloureusement) de procrastination.
C’est quoi, procrastiner ? C’est une forme de comportement qui consiste à différer les tâches pénibles, à risque ou à fort enjeu émotionnel. "Tous les degrés sont possibles, d'un blocage passager pour une tâche que l'on repousse ponctuellement, jusqu'à la tendance durable à tout remettre à plus tard avec des conséquences matérielles très sensibles", explique le Pr Antoine Pelissolo, psychiatre à l’hôpital Henri Mondor et auteur de "Vous êtes votre meilleur psy !" (Ed. Flammarion). Les troubles peuvent apparaître à un jeune âge mais viennent souvent avec l’entrée dans l’âge adulte, le travail et les responsabilités familiales et administratives.
Pourquoi certaines personnes procrastinent-elles ? Il y a deux raisons principales à la procrastination. "C’est d’abord l’hésitation (par quoi je commence ? Comment je m’y prends ?) qui est en cause. Et aussi une forme de perfectionnisme (est-ce que je suis vraiment prêt à le faire maintenant ?). Quand un procrastinateur commence quelque chose, il a à chaque fois l’impression qu’il doit arriver au but en une seule fois et de manière parfaite", continue le psychiatre. Les personnes concernées sont souvent, au départ, d’un naturel anxieux.
Faut-il absolument changer ? Ca dépend. La procrastination est un thème de plus en plus abordé et souvent présenté comme un obstacle à la productivité (une obsession de notre époque). Mais certaines personnes produisent un très bon travail la veille de la dead-line. Et c’est très bien comme ça. "Comme dans toutes les tendances de la personnalité, certaines sont acceptables et sont une manière d’être, presque un choix personnel", rappelle le Pr Pelissolo. Mais dans d’autres cas, cette tendance à "traîner" est très mal vécue. "Si il y a une souffrance forte, une lutte intérieure, une angoisse, une culpabilité ou si la procrastination provoque des problèmes de fonctionnement, comme des retards importants, il faut agir. Un cercle vicieux peut se mettre en place : moins la personne en fait, moins elle arrive à en faire. Sa situation peut s’aggraver. »
Quelles solutions contre la procrastination ? Inutile de décréter "J'arrête complètement de procrastiner dès aujourd'hui", c’est voué à l’échec. Misez plutôt sur un plan d’action raisonnable et ciblé, pour ne pas vous décourager.
- Priorisez vos objectifs et commencez par ceux qui comptent le plus, tout en présentant le moins de difficultés.
- Segmentez la tâche, sans vous fixer d’objectifs inatteignables. Avec des sous-objectifs, ce que vous avez à faire cessera d’être une montagne à gravir. "Par exemple, au lieu de se dire qu’on va ranger une pièce tout entière, c’est bien de commencer par l'armoire. C’est une façon de relativiser l’enjeu et d’avoir une vision plus claire sur l’objectif. " N'hésitez pas à faire un plan d’attaque écrit, pour voir où vous en êtes.
- Organisez vos activités en fonction des capacités que vous vous connaissez, notamment des jours ou des horaires où vous êtes habituellement le plus productif.
- Faites plusieurs choses à la fois. La plupart des procrastinateurs ont l’impression qu’ils ne peuvent passer d’une tâche à l’autre qu’une fois qu’ils ont terminé la première. Faute d’avoir terminé une chose, ils attendent. Non : ouvrez plusieurs chantiers en même temps.
- Jetez un regard positif sur le chemin parcouru. "Même si une tâche n’est pas terminée, ce qui a été accompli est utile. Il ne faut pas hésiter à s’accorder des temps de pause, des temps de récompense", conseille le Pr Pelissolo.
- Passez en mode "urgence" quand les blocages résistent, en vous fixant vous-même un délai impératif à ne pas dépasser.
Si ces quelques conseils ne suffisent pas à rendre acceptables les effets de la procrastination dans votre quotidien, il est toujours possible de consulter un spécialiste. Sans tarder.