La solitude, facteur aggravant du stress et de l'état de santé

Une récente étude de l'Université de l'Ohio vient une nouvelle fois illustrer la corrélation entre la solitude des individus et la dégradation de leur état de santé. Les recherches portent ici sur la mesure des taux d'anticorps et de protéines spécifiques à certaines affections, qui augmentent proportionnellement au sentiment d'isolement.

Florian Gouthière
Rédigé le , mis à jour le
La solitude, facteur aggravant du stress et de l'état de santé

De très nombreuses études pointent, depuis des années, les liens clairs entre la solitude et la dégradation de l'état de santé : mortalité due aux cancers, survenance de maladies cardiaques, impact sur le sommeil (1)...

Mieux comprendre les mécanismes physiologiques

Pour dépasser ce simple constat, de nombreux chercheurs essaient aujourd'hui d'identifier les mécanismes physiologiques qui entrainent cette dégradation. Une récente étude vient ainsi pointer du doigt certains dysfonctionnements du système immunitaire associés à l'isolement des individus.

Ces travaux, présentés à l'occasion du dernier congrès de la Society for Personality and Social Psychology, portent sur un groupe de 200 femmes récemment traitées pour le cancer du sein. L'objectif initial de l'équipe de recherche de l'Université de l'Ohio était d'identifier les paramètres aggravant l'expression de deux virus de l'herpès dans cette population. Outre la qualité de sommeil, l'âge ou l'existence d'autres affections, la solitude ressentie (1) s'est révélée très étroitement associée à l'activation d'un des virus étudiés : le cytomégalovirus.

Il s'agit d'un virus fréquent, qui peut rester en sommeil dans l'organisme durant de très longues périodes de temps, et s'exprime essentiellement chez des patients dont les défenses immunitaires ont été affaiblies. Implicitement, c'est donc la sensation de solitude qui apparaît à l'origine de la dégradation du système immunitaire. Des effets qui apparentent fortement la solitude à une situation de stress chronique.

La solitude comme facteur aggravant du stress

Afin de préciser ces résultats, l'équipe impliquée dans cette recherche a mis en place un nouveau protocole d'étude. Leur intention a été de mesurer la réponse physiologique au stress de différents sujets, comparés sur la base de leur sentiment d'isolement social.

Le groupe étudié incorporait, outre certaines femmes du premier échantillon, des personnes en surpoids et des individus sans problèmes de santé spécifiques. Ceux-ci, après avoir remis un échantillon de leur sang, ont été placés dans les situations psychologiquement stressantes prévues par un test standardisé. Au terme de l'exercice, des composés bactériens - inoffensifs mais connus pour provoquer une réaction immunitaire rapide - ont été injectés dans l'organisme des participants.

Un second prélèvement sanguin a permis de mesurer la réaction individuelle au stress. Quelque soit le sous-groupe étudié, les patients souffrant le plus de solitude se sont très nettement distingués… par une explosion du taux d'une protéine bien connue pour engendrer, lorsqu'elle est produite en quantité trop élevée, les inflammations et des lésions spécifiques à la polyarthrite rhumatoïde.

De tels travaux restent difficiles à interpréter. Il faudrait, en effet, distinguer si les dégradations immunitaires mesurées ne sont pas, au moins partiellement, la conséquence de comportements associés à la situation d'isolement : rythme de vie, comportement alimentaire, etc. Il resterait également à identifier quels facteurs psychologiques précis, propres à la vie solitaire, sont determinants dans l'apparition des phénomènes mesurés.

 

(1) Loneliness and pathways to disease. Hawkley LC, Cacioppo JT. Brain Behav Immun. 2003 Feb;17 Suppl 1:S98-105.

(2) Cette "solitude ressentie" à été quantifiée au travers d'un test standardisé, l'UCLA Loneliness Scale.

Sources : résumés des interventions du Congrès annuel de la Society for Personality and Social Psychology (SPSP) et communiqué de l'Université de l'Ohio