La pandémie a-t-elle favorisé les TOC ?
Quand on pense au coronavirus, on pense microbe, contagion... des sources d’angoisse pour tout le monde mais qui sont encore plus importantes pour les patients atteints de TOC.
Les TOC sont caractérisés par des pensées irrationnelles persistantes ou des obsessions. Parmi les thèmes de ces obsessions il y a la peur des contaminations ou les vérifications incessantes. Afin de lutter contre l’angoisse qu’elles génèrent, les personnes atteintes ont des comportements répétés, des compulsions.
Souvent, les compulsions sont en liens avec les obsessions . Celui qui a peur des microbes va se laver, lorsque c’est la peur de ne pas avoir éteint la lumière en partant de chez soi, la personne retournera vérifier jusqu’à une vingtaine de fois que ça a bien été fait. Les patients ont en général conscience du caractère disproportionné de ces comportements mais, n’arrivent pas à les maîtriser.
Quelqu’un qui va se laver les mains en rentrant de ses courses va le faire une fois, peut-être plus précautionneusement en tant de pandémie, puis va passer à autre chose. Pour les personnes souffrant de TOC, le comportement va se prolonger, au risque de s’abîmer les mains et en faire une porte d’entrée pour les germes ! Tout cela, au final, sans que cela ne soulage les angoisses, d’où le caractère irrationnel.
L’annonce d’une épidémie accroît les angoisses et les TOC
En théorie, le simple fait d’annoncer la présence d’un virus, génère de l’anxiété, ce qui peut aggraver les TOC. Contrairement à ce qu’on pourrait penser intuitivement, les recommandations sanitaires officielles, comme le lavage des mains et la désinfection, n’aident pas parce que les principales prises en charge des TOC, sont les TCC, les thérapies comportementales et cognitives.
Ce sont des psychothérapies qui aident les patients à modifier leurs comportements à travers un travail sur les pensées et les émotions. Elles reposent notamment sur des exercices d’exposition progressive, à faire entre les séances. Pour quelqu’un qui a un TOC de lavage, il s‘agira précisément de ne pas se laver les mains pendant un certain temps. On comprend alors que cela entre en contradiction avec les messages de prévention diffusés actuellement.
A l’annonce de ces mesures, les patients ont d’ailleurs eu ce cri du cœur : "Je vous l’avais bien dit docteur". Ces recommandations sanitaires "légitiment" les patients dans leur TOC, ce qui n'est pas souhaitable.
Une prise en charge efficace des TOC repose sur un suivi régulier
Le confinement a été loin d'être évident. Comme l’essentiel des soins en dehors de l’hospitalisation, la plupart des consultations ont été assurées à travers la télémédecine. Pour le suivi individuel et le renouvellement de prescriptions de médicaments antidépresseurs, utiles dans certains TOC, cela a été suffisant. Pour les TCC, beaucoup de soins se font en groupe ou en hôpital de jour, ils ont donc été suspendus. Plus inquiétant, depuis le 11 mai, une vague importante d’aggravations a eu lieu chez les patients les plus fragiles et ce toutes maladies psychiatriques confondues.
Associer l’entourage des malades à cette reprise
Il était temps de revenir à la normale pour réactiver les prises en charge. L’aide des proches est également indispensable à la réussite du traitement .
Après cette période de confinement, ils ont un vrai rôle à jouer. A condition d’être bien informés, sinon, pensant bien faire, ils peuvent en réalité accentuer ou maintenir les TOC.
On voit parfois l’entourage aider le patient dans ses rituels de décontamination, ce qui est contre-productif. Pour aider à mieux comprendre les maladies psy, on peut utiliser des films. Pour les TOC, c’est ce qu’on peut voir dans le film "Aviator " dans le destin du milliardaire Howard Huges, qui, a fini sa vie seul, incompris, avec beaucoup d’angoisses et des comportements d’accumulations.
Pour destigmatiser la maladie et sensibiliser l’entourage, l'exemple des témoignages de stars elles-mêmes atteintes de TOC comme le chanteur Justin Timberlake ou l’actrice Cameron Diaz, peut être intéressant. A l’hôpital ou à Hollywood, toutes les personnes souffrant de TOC n’ont heureusement pas des destins tragiques comme dans Aviator ! C’est rassurant pour le patient mais aussi pour l’entourage.