Coronavirus : quelles sont les pistes de traitements ?
L’évolution de l’épidémie provoquée par le nouveau coronavirus est très rapide. La communauté scientifique internationale se mobilise donc d’une façon exceptionnelle pour trouver un traitement.
Le nombre officiel de personnes touchées par le coronavirus 2019 ncov a encore augmenté de près de 20% en 24 heures. Elles étaient plus de 24 500 mercredi 5 février.
Le chiffre serait d’ailleurs très loin de la réalité car les capacités diagnostiques locales sont insuffisantes. Cela crée aussi une incertitude sur le nombre de décès. 500 personnes seraient décédées pour l’instant. Le besoin d’un traitement est urgent. La communauté scientifique internationale se mobilise. Les équipes françaises sont notamment à la pointe de ces recherches.
Géraldine Zamansky, chroniqueuse et journaliste à la rédaction, nous explique les avancées des chercheurs.
Vous avez pu échanger avec les virologues qui sont en train d’identifier des molécules prometteuses ?
« Oui j’ai eu la chance de pouvoir discuter hier soir avec le Pr Bruno Lina, directeur du Centre National de Référence des virus des infections respiratoires de Lyon. Il venait justement de faire un point avec les médecins et les chercheurs engagés dans la lutte contre ce nouveau coronavirus en France. Car une coopération très étroite s’est d’emblée mise en place entre tous ces professionnels. Le Pr Lina m’a effectivement expliqué qu’ils avaient déjà identifié plusieurs « candidats-traitements » dans le cadre de leurs travaux « de fond » sur les virus respiratoires. C’est-à-dire que l’on bénéficie aussi de toutes les recherches sur la grippe et les autres coronavirus comme le SRAS et le MERS, responsables des épidémies précédentes. »
Comment ont-ils pu aussi vite mettre au jour des traitements potentiels ?
« C’est grâce à un mode de recherche particulier. D’abord, ils ont décrypté très précisément les interactions entre ces familles de virus et les cellules de l’organisme. C’est-à-dire comment ceux-ci entrent dans la cellule et surtout comment ils réussissent à y proliférer, tout en freinant les défenses immunitaires. Et pour enrayer ces mécanismes, au lieu d’essayer de créer un médicament, ils ont testé des molécules qui existent déjà ! C’est étonnant, mais parmi les principales sources d’espoirs que m’a présentées le Pr Lina, il y a un traitement contre l’hypertension ! Non seulement cela freine la multiplication du virus mais en plus ça stimule des réactions contre lui. »
Les chercheurs sont-ils en train de tester ce médicament sur le nouveau coronavirus ?
« … Presque. J’étais comme vous, un peu trop prompte à m’enthousiasmer. Il faut quand même un peu de temps pour correctement cultiver les souches de virus obtenues à partir des patients arrivés en France. Mais très vite, cela devrait commencer « in vitro », en mettant « la molécule sur le virus » pour faire très simple. Et peut-être parallèlement sur un modèle animal en cours de préparation. Dans le meilleur des cas, une réponse positive pourrait être obtenue en 4 semaines. Pendant ce temps, toutes les procédures administratives d’un essai clinique seraient préparées. Comme le médicament existe déjà, cela pourrait être directement une « phase 2 » chez l’homme. »
Ces délais seraient ainsi accélérés pour tenir compte de l’urgence sanitaire représentée par ce virus en Chine ?
« Oui, toute la chaîne de validation des protocoles de recherche est mobilisée. Y compris les contrôles éthiques pour les patients. C’est indispensable car avec de la chance, le traitement contre l’hypertension ne sera pas le seul à pouvoir être testé. Les équipes de Pasteur Paris et Lille vont aussi confronter sept candidats au virus 2019 ncov. Et parmi eux, deux molécules issues de la médecine traditionnelle chinoise ! D’ailleurs, pour vous dire à quel point les progrès français sont suivis au niveau international : une équipe de la chaîne nationale chinoise CCTV était présente à la conférence de presse de l’INSERM vendredi matin animée notamment par les Pr Yasdanpanah et d’Ortenzio. »
Mais rassurez-nous, aujourd’hui, les équipes soignantes ne sont quand même pas complètement démunies face à ce virus ?
« Non, pas complètement. Les médecins chinois ont très vite tenté d’utiliser un traitement éprouvé contre le VIH. C’est le Ketrala. Les premières réponses sont encourageantes, mais tout le monde attend avec impatience la publication officielle de leurs résultats promise ces jours-ci. Ils testent aussi une autre molécule développée contre le virus Ebola, le remdisivir. C’est d’ailleurs elle que les équipes françaises utilisent aujourd’hui dans un cadre dit « compassionnel ». C’est-à-dire quand les autres stratégies mises en œuvre ne parviennent pas à empêcher la dégradation de l’état du patient.
Les laboratoires qui produisent ces molécules les mettent à la disposition du corps médical et leur côte en bourse grimpe ! Au moins, pour une fois, les règles du business peuvent un peu converger avec les progrès sanitaires ! »