Listériose : découverte d'un nouveau traitement
Grâce à des données récoltées depuis 1998, des chercheurs français ont avancé sur les causes et le traitement de cette maladie rare aux conséquences graves, souvent mortelles.
Depuis 1998, date de sa déclaration obligatoire, 98% des cas de listériose signalés sur le territoire français ont été soumis au Centre national de référence Listeria (CNRL) à l'Institut Pasteur. Pour avancer dans la connaissance de cette maladie, des chercheurs du CNRL associés à des équipes de l'Inserm et de l'université Paris Descartes, ont récolté des données parmi plusieurs centaines de cas, entre le 3 novembre 2009 et le 31 juillet 2013, soit un peu plus de trois ans. Ils publient leurs conclusions dans la revue médicale, The Lancet Infectious Diseases.
Ils ont progressé sur "l'analyse des caractéristiques cliniques, la caractérisation des isolats de Listeria et la détermination des facteurs prédictifs de la mortalité à 3 mois ou de l'altération persistante par régression logistique". Autrement dit, ils ont étudié les facteurs de contamination, pour améliorer la prévention, et apporter une meilleure prise en charge.
Le but de cette étude, nommée MONALISA :
- Etudier les facteurs de risque de survenue d’une listériose (cliniques, biologiques), et les facteurs pronostiques de mortalité.
- Décrire les pratiques thérapeutiques, dans les trois formes de l’infection (septicémique, cérébrale et maternonéonatale).
- Identifier d’éventuelles prédispositions génétiques à cette infection.
Ils se sont appuyés sur 818 cas : 427 cas d’infection septicémiques, 252 cas d’infection cérébrale et 107 infections maternelles et néonatales.
Les chercheurs ont mis au jour que l’infection pouvait être favorisée par le patrimoine génétique, pour des personnes plus jeunes que les autres. "Certains patients ne présentant pas de facteurs de comorbidité attirent particulièrement notre attention", résume le Pr Marc Lecuit, microbiologiste et directeur du CNRL.
Un risque pour les femmes enceintes
D'autres populations à risque sont connues depuis longtemps: les personnes âgées, celles atteintes d’un cancer, d’une maladie du sang ou du foie (cirrhose…), celles qui ont subi une transplantation d’organe, celles dont le système immunitaire est affaibli et les diabétiques insulinodépendantes.
Les femmes enceintes sont elles aussi touchées par la listériose. Les symptômes sont les mêmes que la grippe. La maladie est surtout dangereuse pour le fœtus. L’étude montre que seulement 5% des 107 femmes enceintes ont une grossesse "sans incident". Près d’un quart des autres (24%) ont subi une fausse couche, "mais jamais après 29 semaines de gestation ou au-delà de 2 jours d'admission à l'hôpital".
En terme de prévention, les médecins déconseillent aux femmes enceintes de manger de la charcuterie ou du fromage au lait cru.
Dans le reste de la population, la listériose entraîne la mort de 20 à 30 % des patients qui développent une septicémie ou d’une infection du système nerveux.
Un nouveau traitement plus efficace
Des avancées importantes ont aussi été réalisées sur les traitements. Il semblerait que la prescription de corticoïdes puisse nuire. En revanche, les chercheurs ont constaté qu’un antibiotique qui n’apparaît pourtant pas dans les conseils habituels pour traiter la maladie pouvait être efficace. Il appartient à la classe des aminosides (isépamicine, gentamicine, amikacine, la néomycine…).
Cet antibiotique doit être administré par injection, car il est mal absorbé par l’intestin. En revanche, il traverse bien le placenta. « Ces deux faits ont des implications cliniques immédiates et concrètes », se réjouit le Pr Lecuit.
Chaque année, environ 400 cas de listériose sont recensés en France. Ces chiffres sont stables depuis 2008.
La listériose fait souvent parler d’elle au travers de scandales sanitaires. Cette infection par la bactérie Listeria monocytogenes est mortelle. Chez l’homme, la contamination se fait surtout par l’ingestion d’aliments contaminés par la bactérie. Les autorités sanitaires surveillent donc sa présence dans la nourriture. Les charcuteries cuites (langue, tête, rillettes), les produits de saurisserie, les graines germées réfrigérées, et les produits au lait frais (fromages à pâte molle et au lait cru) sont les principales sources de contamination en France, et donc particulièrement ciblés.