Maladie de Huntington : une affection neurologique incurable

La maladie de Huntington, ou chorée de Huntington, est une affection neurologique grave et héréditaire. Elle entraîne l'apparition progressive d'importants troubles cognitifs, psychiques et moteurs.

La rédaction d'Allo Docteurs
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Rédigé le , mis à jour le
Marina Carrère d'Encausse et Antoine Piau expliquent la maladie de Huntington
Marina Carrère d'Encausse et Antoine Piau expliquent la maladie de Huntington

Quels sont les symptômes de la maladie de Huntington

Des mouvements brusques et involontaires, ce sont les signes d'une maladie génétique rare aujourd'hui incurable : la maladie de Huntington, aussi appelée chorée de Huntington. C'est un médecin de famille américain, George Huntington, qui décrit cette maladie pour la première fois en 1872. 150 ans plus tard, les chercheurs ont compris que derrière ces mouvements incontrôlés se cache une anomalie génétique. Les premiers signes de cette maladie neurodégénérative apparaissent entre 30 et 50 ans, entraînant d'importants troubles moteurs, cognitifs et psychiatriques. 

Cette anomalie concerne le gène HD. Notre ADN est constitué d'environ 25.000 gènes et chacun joue un rôle bien précis au cours de notre développement. Ensemble, ces gènes déterminent ce que nous sommes. Si l'un d'entre eux dysfonctionne, c'est toute la machine qui est ébranlée. Avec des conséquences plus ou moins graves.

Le gène HD est l'un de ces gènes. Il sert à fabriquer la huntingtine, une protéine essentielle dans le développement cérébral. Chez les patients, ce gène est déficient avec pour conséquence la destruction progressive des neurones. La maladie est dite autosomique dominante ; autrement dit, elle se transmet par les chromosomes non sexuels et une seule copie du gène muté sur les deux gènes codant pour la protéine suffit pour quqe la maladie se développe).

Vivre avec la maladie de Huntington

Rare, l'affection concerne 18.000 Français dont 6.000 présentent des symptômes et 12.000 sont porteurs du gène mais encore asymptomatiques (source : INSERM). Les premiers symptômes sont des mouvements brusques et anormaux, qui s'étendent peu à peu à tous les muscles : 90% des patients présentent ces mouvements, baptisés "chorée", souvent augmentée par le stress et les émotions  Autres symptômes très invalidants, des troubles cognitifs, comme des pertes de mémoire, des difficultés à organiser les tâches multiples, mais aussi des troubles psychiatriques avec de l'anxiété, une tendance à la dépression, un risque de suicide et à une désinhibition, ce qui peut être difficile à vivre aussi pour l'entourage. Ces troubles s'aggravent progressivement, plus ou moins rapidement selon les patients.

Comment soigner la maladie de Huntington ?

Il n'y a pas de traitement qui guérisse la maladie de Huntington. Les patients bénéficient de traitements qui soulagent les symptômes, comme des antidépresseurs, des anxiolytiques, des somnifères. La réééducation physique et orthophonique limite les troubles de l'équilibre, de la posture, de la parole et de la déglution. Une activité physique est recommandée, tout comme un soutien psychologique au moment au diagnostic notamment. Il existe du matériel pour faciliter la vie quotidienne comme un fauteuil adapté, un vélo aménagé pour être promené, etc.

La maladie de Huntington est une véritable affaire de famille, qui se transmet de génération en génération. Quand un parent est atteint de la maladie de Huntington, l'enfant aura un risque sur deux de l'être aussi. Il existe depuis 1993 un test génétique assez simple pour savoir si on est porteur. Mais peu de patients le font car il s'agit d'une douloureuse épée de Damoclès et que le décès survient souvent une vingtaine d'années après l'apparition des premiers symptômes. Durant la grossesse, il est possible de faire un diagnostic pré-implantatoire pour déterminer si le foetus est porteur du gène.

Maladie de Huntington : le manifeste d'Alice Rivières

Il n'est pas toujours facile de prendre la décision de faire ou non le test génétique. Alice Rivières, elle, a fait ce choix.

Alice Rivières est atteinte de la maladie de Huntington. Elle parle de sa maladie avec beaucoup de sensibilité et de talent d'écriture dans un livre : Manifeste de Dingdingdong, paru aux éditions du même nom. Aujourd'hui âgée de 40 ans, Alice n'a aucun symptôme de la maladie. Son témoignage est précédé de la description médicale inaugurale de la maladie en 1872 par George Huntington, pour la première fois traduite en français.

Maladie de Huntington : où en est la recherche ?

Il n'existe aujourd'hui aucun traitement pour guérir la maladie de Huntington. Mais la recherche avance pour retarder au maximum le début des symptômes et l'avancée de la maladie, même s'il est pour le moment bien trop tôt pour commercialiser un traitement. 

La thérapie génique, qui consiste à injecter un "gène-médicament" est une piste prometteuse, et l'un des essais tente d'apporter un facteur qui protègerait les neurones, le CNTF. D'autres pistes cherchent à bloquer ou ralentir le gène muté de la huntingtine, pour limiter sa production : deux études sont en cours et sept arrivent d'après l'Association Huntington France.

La thérapie cellulaire ou "greffe de neurones", qui consiste à implanter dans le cerveau des cellules souches qui se transforment ensuite en neurones fonctionnels (cette piste toutefois ne guérirait pas la maladie, mais conserverait ou restaurerait les fonctions perdues). Plusieurs essais cliniques sont en cours. Si 2021 a été une année de déception du fait de l'arrêt d'un essai clinique, elle apporte d'autres sources d'espoir d'après l'association Huntington's : l'AM130, administré en une seule fois lors d'une chirurgie cérébrale, sera testé sur des êtres humains, après avoir montré sa sécurité sur des animaux. Le branaplam est en phase 2b et présente l'avantage d'être donné en comprimés, tout comme le PTC518.

Une autre piste consisterait à bloquer l'expression du gène muté, par l'injection de séquences génétiques qui se fixeraient sur le gène et l'empêcherait de fonctionner.

Un certain nombre de neuroprotecteurs, qui protègent les neurones, sont donc à l'étude. La cystamine en fait partie mais le chemin reste long pour qu'elle prouve son efficacité. Un autre protocole se déroule en ce moment à l'Institut du cerveau et de la moelle épinière à Paris et il peut paraître surprenant puisqu'il s'intéresse à la déperdition énergétique des cellules. L'idée est venue d'une plainte récurrente des patients qui constataient perdre du poids de façon inexpliquée. Pas beaucoup, un kilo par an mais assez pour montrer un dysfonctionnement énergétique. Et quand les chercheurs ont analysé leur sang, ils ont vu en effet de légères carences de trois acides aminés qui pourraient servir à combler les déperditions énergétiques des cellules.

Cette piste de recherche est très prometteuse, mais cependant n'imaginez pas un complément alimentaire commercialisé en pharmacie. Les chercheurs ont mis au point une huile baptisée triphepatnoïne, qui contient une grande quantité des trois acides aminés qui manquent aux malades. Pour l'instant cette huile en est encore à l'état expérimental.

La triheptanoïne, un espoir avorté dans la maladie de Huntington

Actuellement, la maladie de Huntington est incurable mais la recherche continue et elle avance. L'Institut du cerveau et de la moelle épinière (ICM) à Paris étudie les effets d'une huile qui pourrait retarder le début des symptômes et l'avancée de la maladie.

La triheptanoïne est un médicament. Sur une période de trois ans, une centaine de malades testent ses effets. L'ICM leur fournit cette huile. Les chercheurs se sont orientés sur cette piste à la suite d'un premier constat : les patients atteints de Huntington ont tendance à perdre du poids. En analysant leur sang, ils ont constaté une légère carence en acides aminés, d'où l'idée de modifier leur apport énergétique.

Pour fournir de l'énergie aux neurones, les cellules nourricières utilisent habituellement les sucres rapides. C'est leur carburant. Un carburant que les malades de Huntington ont du mal à utiliser. Avec l'huile triheptanoïne, les chercheurs apportent une autre source d'énergie mieux assimilée par les patients. L'huile pourrait permettre de ralentir la disparition des neurones et donc la dégradation de leur état. Pour le vérifier, tous les participants de l'étude passent régulièrement des IRM.

Les chercheurs doivent procéder à l'analyse statistique de plusieurs centaines d'imageries cérébrales pour mesurer précisément les effets de cette huile médicament. Une quinzaine de patients doivent encore être inclus dans l'étude. En 2017, les  résultats ont montré une amélioration du métabolisme cérébral en étant administré dans les débuts de la maladie. Mais cela n'a pas débouché sur d'autres essais impliquant l'huile dans le traitement de la maladie de Huntington.

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