Quelle retraite pour les aidants familiaux ?
Les proches aidants mettent souvent leur vie professionnelle entre parenthèses. Si le projet de réforme des retraites vise à améliorer leur accès à la retraite, les associations demandent des changements plus profonds.
Juliette profite de chaque occasion pour stimuler son fils, y compris à l’heure du goûter. Émile est atteint de troubles autistiques, un diagnostic posé à l’âge de 11 ans. Mais c’est dès sa petite enfance que Juliette est devenue aidante, laissant de côté sa vie professionnelle.
"Il a une autonomie relative, des problèmes de motricité fine. On m'avait parlé de retard global de développement et qu'il allait avoir un rattrapage. Pour moi, j'allais m'arrêter six mois, peut-être un an et en fait ça a duré 10 ans", raconte Juliette.
Offrir des trimestres cotisés à l'aidant
Sans place en structure adaptée pour son fils, Juliette se charge elle-même de trouver un orthophoniste, un kiné, tout en s’occupant d'Émile à plein temps. Pendant cette période de sa vie, elle ne cotise pas pour sa retraite.
"Ce n'est pas vraiment un travail qui a une reconnaissance, pourtant, c'est comme si on menait une petite entreprise. Comment puis-je valoriser mes 10 ans de rupture professionnelle sachant que je n'ai pas rien fait pendant ces 10 années-là", s'interroge Juliette.
Pour des aidants sans activité comme l’a été Juliette, l’État a prévu une compensation avec l’assurance-vieillesse.
Faciliter l'accès à l'assurance-vieillesse
Depuis le 1er janvier 2015, l’État, via la CAF, peut offrir des trimestres cotisés à l’aidant, qui compteront pour sa retraite, sous deux conditions :
· Le nombre de trimestres maximum est fixé à 8.
· Le taux d’incapacité du proche dépendant doit être supérieur à 80 %.
Le nouveau projet d’assurance, inclus dans la réforme des retraites, prévoit de changer ces conditions, en abaissant notamment le seuil d’incapacité."Ça serait accessible à ceux qui ont un taux d'incapacité en dessous de 80 % sans qu'on ne sache effectivement jusqu'où ira ce pourcentage" explique Morgane Hiron, déléguée générale du collectif Je t'aide. "Ce qui est sûr, c’est que beaucoup d’aidants ont une charge lourde et complexe avec des personnes en situation de handicap qui sont bien en-dessous de 80 %" s'inquiète-t-elle.
Trop peu d'aidants concernés
Cette association espère aussi une augmentation du nombre de trimestres cotisés par l’Etat à la place de l’aidant.
"Les aidants s'arrêtent parfois de travailler pendant des années et pas seulement pendant 8 ou 16 trimestres de retraite, pour s’occuper par exemple d’un enfant en situation de handicap. On est vraiment encore en attente d’un certain nombre de définitions pour cette réforme", précise Morgane Hiron.
Sur les 11 millions d’aidants estimés en France, seulement 60 000 profitent du format actuel de l’assurance-vieillesse. Selon le gouvernement, le nouveau dispositif bénéficierait à 40 000 aidants supplémentaires.