Respirateurs Philips défectueux : ce qu'il faut savoir sur le "RespiratorGate"
Une action collective regroupant plus de 1 600 victimes a été lancée contre la société Philips. Sa responsabilité dans la mise sur le marché de respirateurs dangereux pour la santé des utilisateurs est questionnée.
Ils ont été vendus pour soulager les malades mais seraient pour certains à l'origine de graves problèmes de santé. Les respirateurs Philips défectueux sont dans le viseur de la justice. Et le 7 novembre s'est tenue une audience, marquant la première étape officielle en vue d’une procédure judiciaire.
Différents types de machines de ventilation sont concernés, notamment celle destinées à des patients atteints de BPCO (bronchopneumopathie chronique obstructive) et celles utilisées par les personnes souffrant d’apnée du sommeil.
La mousse insonorisante mise en cause
L’affaire remonte à juin 2021, quand la marque elle-même rappelle un certain nombre de machines de ventilation. L’un des constituant, une mousse insonorisante, pourrait en effet être dangereuse pour la santé. Certaines de ses particules, susceptibles d’être inhalées ou ingérées par l’utilisateur, sont soupçonnées de provoquer des maux de tête, des problèmes respiratoires et même des cancers.
Une action collective, rebaptisée le RespiratorGate par l’avocat des victimes Me Christophe Léguevaques, a été initiée. Celui-ci représente aujourd’hui plus de 1 600 personnes. Et les premiers mois de batailles juridiques ont déjà permis de mettre en évidence des éléments accablants pour Philips.
"Philips connaît cette information depuis 2015"
"Nous avons obtenu la preuve qu'en 2015, Philips avait été informé par le fabricant de la mousse que cette mousse n'était pas adaptée à un usage médical" affirme Me Léguevaques. "Notamment parce qu'elle était soumise à de la chaleur à cause du moteur et à de l'humidité à cause de la respiration. Philips connaît cette information depuis 2015 et l'a gardée secrète jusqu'à présent" poursuit-il.
Mais ce n'est pas tout : "En 2015 le fabricant avait proposé à Philips une autre mousse plus résistante mais Philips n'a pas donné suite, peut-être pour des raisons économiques, parce qu'une mousse plus résistante est plus chère" avance encore l'avocat.
Un remplacement des appareils trop lent
Les Autorités de Santé sont également très remontées contre le fabricant Philipps et commencent à s'impatienter. Et pour cause : c'est en juin 2021 que Philipps lançait un rappel mondial de ses produits. En France, ce rappel concernerait 370 000 patients. Mais l'application du rappel et le remplacement des appareils traîne. Les autorités sanitaires s’en mêlent et posent un ultimatum : au 31 décembre 2022, 100 % des appareils de ventilation défectueux doivent être remplacés.
Bilan, cinq mois plus tard, fin mai 2023 : l’objectif n’est pas atteint car des modèles restent en circulation. Si quasiment tous les appareils concernant les apnées du sommeil ont été remplacés, seulement 16,5% d’un autre modèle de ventilateurs défectueux l’ont été. Cela signifie qu’il en reste encore en circulation, en France et dans d'autres pays.
Vers l'ouverture d'un procès ?
Face à la lenteur des remplacements, l’Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des Produits de Santé (ANSM), a mis en demeure la société Philips en 2022. Et à l'été 2023, l’agence a même saisi le procureur de la République, une décision exceptionnelle. "Pour ce qui concerne le remplacement des appareils, on est rentrés dans une sorte de bras de fer avec cette société pour qu'elle mette en oeuvre le rappel rapidement et qu'elle remplace les appareils. Il y avait matière à saisir le procureur puisqu'on a identifié un certain nombre de manquements qui méritaient d'être remontés" justifie Thierry Thomas, directeur adjoint des dispositifs médicaux à l'ANSM.
L’audition du 7 novembre visait à enregistrer les éléments de dossier de tous les patients qui souhaitent saisir la justice. C’est donc la première étape officielle de la procédure. Le fabriquant Philipps doit désormais apporter des réponses et explications. À partir de là, la justice décidera ou non de lancer un procès.