Vaccins : les Français, champions de la défiance
VIDÉO - Alors que s’achève une consultation nationale sur la vaccination, une vaste étude internationale révèle que la France est le pays où la défiance à l’égard de cette pratique médicale est la plus ancrée. Entretien avec le Dr Robert Cohen, pédiatre, invité dans "Le magazine de la santé", le 12 septembre 2016.
Quelles mites rongent la couverture vaccinale ? En 2015, pour la première fois, la couverture vaccinale des bébés a baissé d'environ 5% sur plusieurs vaccins de base (diphtérie, tétanos, polio, coqueluche et pneumonie à pneumocoque). Dans ce contexte, Marisol Touraine avait annoncé en janvier 2016 le lancement d’une consultation nationale par Internet sur les vaccins.
Deux jurys - composés de citoyens non spécialistes, de professionnels de santé indépendants et d’experts sanitaires - se sont réunis les 8, 9 et 10 juillet pour réaliser une première synthèse des contributions. Une nouvelle réunion de trois jours doit débuter vendredi 16 septembre, afin de poursuivre ce travail et de programmer d’éventuelles auditions complémentaires.
D’ici à la fin de l’année, un comité d’orientation, piloté par le professeur Alain Fischer, présentera ses conclusions sur la base de ces travaux.
Deux Français sur cinq "doutent"
Hasard des calendriers, une semaine avant la seconde réunion des jurys, un rapport accablant a été présenté par les membres du Vaccine Confidence Project de l'école d’hygiène et de médecine tropicale de Londres. Selon les données collectées par les chercheurs auprès de 66.000 personnes originaires de 67 pays, la nation où la proportion de personnes qui estime que "les vaccins ne sont pas sûrs" est le plus élevée est... la France.
41% des Français "doutent". C’est plus de trois fois la moyenne mondiale. Au palmarès de la défiance, on trouve ensuite la Bosnie-Herzégovine (36%), la Russie (28%), la Mongolie (27%) puis la Grèce (25% à égalité avec le Japon et l'Ukraine), la Slovénie (22%) et l'Arménie (21%).
Au delà de la question de la sûreté, ce sont 17% qui doutent de leur efficacité. Pour 12%, les vaccins infantiles "ne sont pas importants".
Polémiques médiatiques contre données scientifiques
De l’avis des chercheurs, les polémiques médiatisées sur les effets indésirables de plusieurs vaccins (hépatite B, papillomavirus humains, grippe A H1N1) pourraient être la principale cause de ce record. Dans ce climat, les conclusions sans appel des études scientifiques quant à l'innocuité des vaccins, ou les données plus que rassurantes issues des suivis de pharmacovigilance, semblent inaudibles.
À ceci pourrait s’ajouter les interrogations nourries par plusieurs paradoxes de la politique vaccinale française comme l'absence d'obligation pour les rappels. Les débats philosophiques et éthiques opposant "liberté individuelle" contre "intérêt collectif" sont aussi très prégnants sur notre territoire.