"J'ai le vagin trop large !"
C'est une recherche sur Google qui génère 3 720 000 résultats... Pourquoi tant de succès ? Qu'implique une sensation de vagin trop large et comment se traite-t-elle ?
Que veut dire un "vagin trop large" ?
"Un vagin trop large ne veut pas dire grand-chose, s'exclame d'emblée Marie Véluire, gynécologue et sexologue. Soit il y a un problème anatomique effectif : une laxité (NDLR : relâchement excessif du périnée et du vagin) généralisée, avec des muscles du périnée qui fonctionnent moins bien et moins de sensations pour l'un des partenaires ou les 2." Pour rappel, les muscles du périnée, sorte de hamac qui s'étend du pubis à l'anus, ferment en partie le petit bassin. Ils jouent un rôle dans la continence mais aussi dans les sensations sexuelles et le plaisir car lorsque la femme contracte les muscles du périnée, cela augmente son plaisir et aussi celui de son partenaire puisque les muscles serrent davantage son pénis.
Mais ces muscles peuvent se distendre et se déchirer, souvent à la suite d'un accouchement ou plusieurs. Cela peut aussi provoquer des pets vaginaux, des bruits d'air durant la pénétration ou le rapport sexuel, en plus d'une diminution du plaisir. Beaucoup plus rarement, cette distension du périnée peut aller jusqu'à la "béance vulvaire et vaginale" : la femme a alors l'impression que son vagin est ouvert, du fait d'une distension majeure.
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"Si l'accouchement a été par voie basse, la paroi vaginale se dilate et suivant la qualité des tissus, il peut y avoir un prolapsus, une rectocèle, qui est un prolapsus du rectum (NDLR : le rectum forme alors une hernie dans la paroi arrière du vagin, ou une cystocèle (NDLR : la vessie forme une hernie dans la paroi vaginale) et on a moins de sensations, détaille la spécialiste. Soit c'est fonctionnel, sans lésion réelle : c'est souvent suite à l'accouchement ou la femme n'est pas capable de serrer son vagin."
La ménopause en revanche n'est pas responsable de cette sensation de vagin trop large : "Quand il y a une carence en oestrogènes, les tissus s'amincissent et s'atrophient. Donc les frottements sont douloureux lors de la pénétration mais cela n'a rien à voir avec le vagin trop large d'après le médecin.
"Le vagin trop large, je ne l'ai entendu que de la part d'hommes... reprend le Dr Véluire. Il faut toujours vérifier que le partenaire a de bonnes érections." Car quand l'érection est plus molle, l'homme a moins de sensations et s'il est dans le déni, il estime que c'est à cause d'un vagin trop large... Une consultation auprès de son généraliste permettra de faire le point sur l'érection et de proposer une prise en charge. Mais une femme peut elle aussi souffrir d'un relâchement du périnée mais elle le formulera différemment selon le Dr Véluire : "Elle dira qu'elle ne sent plus rien, qu'elle ne retrouve pas ses sensations d'avant et souvent, c'est qu'elle ne sait pas serrer son périnée."
La prise en charge du "vagin trop large"
La rééducation périnéale
Comme les muscles du périnée manquent de tonicité, la rééducation périnéale est prescrite en première intention. Il faut être très vigilant au choix du praticien : "la rééducation est bien faite si le praticien utilise les 3 techniques (technique manuelle, biofeedback et électrostimulation), détaille la gynécologue. Il faut toujours poser la question des techniques utilisées et demander à son généraliste ou son gynécologue s'il peut recommander une personne ou faire confiance au bouche-à-oreille..."
L'éducation de la patiente est aussi indispensable car le périnée est comme tous les muscles, il faut le faire travailler régulièrement pour l'entretenir ! Savoir le contracter et bouger son bassin durant les rapports sont deux atouts pour retrouver des sensations sexuelles et du plaisir : "apprendre à se connaître est la base !" recommande le Dr Mouly, gynécologue et chirurgien.
La chirurgie, indiquée dans certains cas seulement
La chirurgie est indiquée en cas d'efficacité insuffisante de la rééducation, si certains muscles ont été lésés, s'il y a une pathologie associée comme un prolapsus (descente d'organes) ou une béance vulvaire. Le chirurgien peut alors faire une vaginoplastie, aussi appelée lifting du vagin, et/ou une plastie de la vulve et du périnée (autrement dit, une reconstruction) pour resserrer le vagin et retendre les muscles du périnée.
"Elle doit être faite par un chirurgien gynécologue et non un chirurgien esthétique d'après le Dr Véluire. Le Dr Mouly, conseille également de "préférer un gynécologue disposant d'une formation obstétricale car le périnée est souvent à réparer, tandis que le chirurgien plasticien n'interviendra pas dans un esprit global (or il peut y avoir une cystocèle ou une incontinence)." Il doit toujours explorer les lésions associées avant tout geste chirurgical et avoir l'habitude de pratiquer ce genre de gestes chirurgicaux, afin d'éviter les complications.
"La vaginoplastie, ou lifting vaginal, est indiquée après examen clinique en fonction de la laxité, du diamètre vaginal, de l’évaluation des releveurs de l'anus (faisant partie du périnée) et de l'historique des accouchements", confirme le Dr Mouly.
La prise en charge de la chirurgie par la CPAM dépendra des gestes associés : " si je fais une vaginoplastie, c'est dans le cadre d'une rectocèle. Il faut resserrer le vagin et en plus, il faut réparer les muscles. Dans ce cas, c'est pris en charge. Mais les chirurgiens plasticiens font un geste purement esthétique, qui n'est pas pris en charge." Dans ce cas, il est éventuellement indemnisé en partie par certaines mutuelles.
"C'est un sujet encore tabou, moi personnellement j'examine mes patientes et je demande comment se passent les rapports, s'il y a du plaisir et des pets vaginaux, explique le Dr Mouly. Puis je propose la possibilité d'un traitement..." Ce que confirme le Dr Véluire : "On est dans la chirurgie fonctionnelle : le chirurgien propose et la patiente dispose. On n'opère qu'une patiente gênée. S'il y a un prolapsus léger et un super périnée, il n'y a pas forcément de demande de la patiente car c'est bien toléré. On n'opère pas une gêne : on ne fait pas pour que ce soit beau, mais confortable et efficace !
Laser et radiofréquence
D'autres traitements sont parfois proposés, alors qu'ils ne sont pas tous efficaces : "le laser n’a aucun effet sur la laxité, détaille le Dr Mouly. Il a pour but de traiter la sécheresse vaginale et maintenant l’incontinence urinaire légère et modérée mais il ne traite pas la laxité vraie !
Quand à la radiofréquence, elle réduit le diamètre vaginal en chauffant les tissus, en profondeur (en comparaison au laser) ce qui permet de de secréter du collagène et de de stimuler les fibroblastes. "Elle peut améliorer la laxité de façon limitée, de 20% maximum, évalue le gynécologue. Elle est indiquée si on n'a pas besoin d'un lifting important (ce que l'on observe par l'examen clinique), et on le fait quand c'est en association avec une incontinence urinaire sévère (la patiente tousse et elle a une fuite). Le coût d'une séance est entre 250 et 300€ et on propose 2 à 3 séances d'attaque, plus une séance annuelle d'entretien. On n'a pas beaucoup de recul sur la durée d'action."