Sexualité : pourquoi certaines femmes crient-elles pendant l'amour ?
Les nuits estivales sont parfois perturbées par des gémissements sensuels ou des cris tonitruants de la voisine… Pourquoi ces cris de jouissance ? Peut-on les éviter ?
Pour son plaisir à elle, mais aussi à lui...
Souvenez-vous de cette scène mythique du film Quand Harry rencontre Sally : Meg Ryan simule un orgasme dans un restaurant et finit par hurler de plaisir de façon très convaincante. Simulation dans ce cas précis mais dans le secret de notre alcôve, pourquoi certaines femmes crient-elles lors des rapports sexuels ?
Scientifiquement et poétiquement appelées vocalisations copulatoires, les cris orgasmiques n'ont pas laissé indifférents deux chercheurs plus curieux que les autres. Ils publièrent en 2011 une étude[1], portant sur 71 femmes hétérosexuelles et sexuellement actives. Toutes les femmes de l'étude vocalisaient leur plaisir. Elles jouissaient davantage durant les préliminaires (notamment par stimulation du clitoris) et moins par la suite, en particulier lors de la pénétration. Surprise, si des vocalisations intenses étaient reportées durant leur orgasme, elles l'étaient également avant et pendant l'éjaculation du mâle. Pourquoi crier alors que le plaisir ne les concerne pas directement ?
Pour les chercheurs, cette dissociation entre les vocalisations et l'orgasme féminin indique qu'une partie des cris sont consciemment produits dans le but "de manipuler le comportement masculin à leur avantage" (sic). Selon eux, les femmes crient pour augmenter la montée de l'orgasme de leur homme, l'encourager, améliorer sa confiance en lui. C'est une façon de le guider et de le féliciter.
Les femmes seraient-elles alors de saintes partenaires, dévouées à la jouissance de leur mâle ?
L'étude fit hurler les féministes, réfutant cette idée et ne se satisfaisant pas de cette explication. Rappelons tout de même qu'il s'agissait d'une partie des cris et que cela n'expliquait pas pourquoi les femmes vocalisaient leur plaisir quand elle jouissaient, seules ou avec leur partenaire.
Enfin, et toujours d'après les chercheurs, les cris servaient parfois d'autres causes que le plaisir, notamment à terminer le rapport lorsqu'elles souffrent d'inconfort, de douleurs, d'ennui, de fatigue, ou de manque de temps.
[1] Evidence to suggest that copulatory vocalizations in women are not a reflexive consequence of orgasm. Brewer. Arch Sex Behav. 2011 Jun;40(3):559-64. doi: 10.1007/s10508-010-9632-1. Epub 2010 May 18.
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/20480220
L'influence du X ?
D'aucuns arguent que le porno a influencé les comportements sexuels et que les femmes s'en inspirent. Une conjecture difficile à objectiver, une comparaison des vocalisations copulatoires avant et après l'ère du X étant impossible à réaliser. Mais il est certain que les femmes sont bombardées d'injonctions sexuelles, dont celle de manifester haut et fort leur plaisir… Une injonction qui peut se retourner contre elles (voir encadré suivant)
Une manifestation du plaisir
L'orgasme est une réaction particulièrement intense, où corps et esprit lâchent prise. Les sensations et émotions fortes qui lui sont associées peuvent s'extérioriser de différentes manières : gémissements, pleurs, rires ou cris incontrôlables (et parfois bruyants, au grand désespoir des voisins).
Et si les cris étaient le reflet d'une intensité particulièrement forte, et différente entre hommes et femmes ? De nombreux sexologues estiment que la femme dispose d'une palette d'orgasmes plus large et intense que l'homme, tels Masters et Johnson[1], deux sexologues américains qui avaient étudié les comportements sexuels des deux sexes. Mais d'autres chercheurs[2] ont mesuré l'activité cérébrale pour évaluer la force de l'orgasme et n'ont trouvé aucun argument pour étayer une telle supposition…
Certaines femmes ont besoin d'exprimer leur plaisir pour arriver à son paroxysme. Une sorte "d'auto-encouragement" qui faciliterait l'accession à la jouissance... Mais toutes ne sont pas concernées.
Et si l'explication se trouvait dans l'anatomie ? Le cri pourrait correspondre à une manifestation physique accompagnant la décharge de plaisir. D'après le Dr Patrick Papazian[3], sexologue et auteur de Parlez-moi d'amour (aux éditions L'Opportun), il correspondrait à un relâchement de la cage thoracique. A l'acmé du plaisir, point culminant d'une certaine tension, la cage thoracique se relâche complètement et le cri accompagne l'expiration de l'air contenu dans les poumons.
Manifestement, les vocalisations orgasmiques ont différentes raisons d'être. Mais encore à l'heure actuelle, elles gardent leur part d'incompréhension et de mystère…
[1] Masters., Johnson. 1996. Human sexuel response
[2] Toward an understanding of the cerebral substrates of woman's orgasm. Bianchi-Demicheli. Neuropsychologia. 2007 Sep 20;45(12):2645-59. Epub 2007 May 4
[3] Explication donnée dans un article de l'Express, en date du 16/10/2016
Un moyen d'expression à double tranchant
Les vocalisations à l'horizontale (ou pas), sont un moyen d'expression : elles indiquent à son amant qu'il s'y prend bien et l'incitent à reproduire ce qui a été efficace. Mais si une femme manifeste un plaisir qu'elle ne ressent pas, elle induit en erreur le partenaire qui répètera ce qu'il pense être plaisant, à tort. Répété, ce comportement éloignera la femme du plaisir et la conduira à subir les rapports sexuels sans joie ou à les éviter, faute de réel plaisir...
Comment réprimer les cris ?
Il est vrai qu'au camping ou dans un appartement aux fenêtres ouvertes pour cause de chaleur estivale, il est préférable de faire profil bas (ou plutôt vocalises basses). S'il n'est pas simple de changer ses habitudes, le bon sens offre quelques astuces de la plus douce à la plus tonique.
- se raisonner et se concentrer sur autre chose que le plaisir (la liste de courses, les activités du lendemain, le plat de pâtes du dîner, etc).
- se rappeler que vous croiserez au petit-déjeuner vos voisins de camping au regard forcément lubrique, pendant 2 ou 3 longues semaines.
- plaquer sa main devant la bouche
- mordre son oreiller
- être baillonnée par la main de son amant (ou son amante). Ce jeu de domination-soumission est une option à double tranchant qui risque de redoubler les ardeurs de la "chanteuse lyrique".