Drogues et addictions : un nouveau plan centré sur la jeunesse
Le Plan gouvernemental 2013-2017 de lutte contre la drogue et les conduites addictives a été dévoilé au public, jeudi 19 septembre 2013. Priorité est donnée aux actions de prévention et de suivi auprès des jeunes, des femmes enceintes et des personnes isolées, en privilégiant un meilleur déploiement de techniques bien évaluées.
Programmé sur une durée de quatre ans, le nouveau plan, présenté jeudi 19 septembre 2013, promet la conduite d'actions "fondées sur des observations, des recherches et des expérimentions validées", l'accent étant mis sur la prévention et le suivi des populations les plus à risques.
"Les politiques précédentes ont en effet montré leurs limites", peut-on lire en introduction au texte. "Si elles ont permis de contenir les consommations de la population générale, elles se sont révélées inefficaces, parfois contre‐productives, pour les consommations les plus à risque : celles des jeunes, des femmes, ou des buveurs chroniques."
Valoriser l'existant et les techniques évaluées
"Rares sont les jeunes de 17 ans qui, à cet âge, n'ont expérimenté aucun des trois principaux produits que sont l'alcool, le tabac et le cannabis", a expliqué à la presse Danièle Jourdain-Menninger, présidente de la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (Mildt) et responsable de la préparation du plan. Pour faire face à cette situation, son texte préconise tout d'abord de promouvoir les actions qui font déjà leurs preuves sur le territoire.
Ainsi, il souhaite valoriser les consultations jeunes consommateurs (CJC), animées par des professionnels de la santé, qui accueillent les jeunes de moins de 25 ans, évaluent leur addiction et les aident à y mettre fin.
Au nombre de 400 sur toute la France, ces CJC restent pour l'heure assez méconnues. Le plan souhaite permettre aux professionnels qui assurent ces consultations d'aller vers les jeunes et leurs parents, dans les écoles, les lycées, les centres de formation, les foyers de jeunes travailleurs ou les missions locales.
Dépister précocement
Insistant sur un repérage le plus précoce possible, le plan prévoit de développer la formation de "tous ceux qui interviennent auprès des jeunes". Le protocole d'action RPIB (Repérage précoce et intervention brève) pour réduire les consommations excessives d'alcool, dont l'intérêt a déjà été évalué, sera ainsi valorisé auprès des médecins.
Le plan invite à s'inspirer fortement des expériences européennes en matière d'accompagnement, notamment le programme allemand de sevrage cannabique en ligne sur 50 jours "Quit the shit". Il met également l'accent sur l'intérêt de thérapies impliquant non plus seulement les consommateurs, mais également leurs familles.
Des campagnes de communication ciblées sont par ailleurs prévues, notamment sur les réseaux sociaux. Le mot d'ordre sera de ne surtout pas "porter un discours hygiéniste ou moralisateur, dont il est établi qu'il est contre-productif".
Le texte présenté par le gouvernement suggère enfin de mieux rembourser les produits de sevrage tabagique pour les jeunes adultes de 20 à 25 ans.
Femmes enceintes et personnes isolées
S'il se centre sur la jeunesse, le plan 2013-2017 prévoie également de réaliser des actions similaires à destinations d'autres populations : d'une part, les femmes enceintes, qui renoncent parfois aux soins de peur d'être stigmatisées à cause de leur consommation, et d'autre part les personnes très éloignées des dispositifs d'aide, pour qui doit se développer encore davantage un travail de proximité.
Le texte invite ainsi à développer d'une part les services en ligne d'accompagnement au sevrage du tabac, et d’autre part le nombre des dispositifs mobiles, notamment en milieu rural et pour les usagères de drogue.
Un volet du plan souligne enfin l'importance des actions réalisées en milieu professionnel, notamment au travers de la formation les professionnels des comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) aux conduites addictives.
L'intérêt des "salles de shoot" confirmé
Le plan évoque très largement l'intérêt de l'accompagnement des usagers par des professionnels formés à la prévention, au suivi ou à l’aide au sevrage. "Il nous faut changer notre regard sur les consommateurs de produits stupéfiants, sans complaisance mais avec compréhension", a souligné jeudi Mme Jourdain-Menninger, qui entend faire de la future "salle de shoot", un véritable outil de "médiation sociale". Cette salle de shoot doit voir le jour en novembre 2013 à Paris.
Peu d'évolutions au chapitre pénal
Le plan ne prévoit pas d'évolutions particulières sur le plan pénal. Cependant, ses auteurs souhaitent améliorer l'articulation "santé-justice", au travers de CJC ou des stages de sensibilisation systématiques à l'échelle du territoire.
Pour contrer les trafiquants, qui "explorent de nouvelles routes et de nouveaux vecteurs d'acheminement des produits" (par voie maritime ou internet, par exemple), la Mildt s'adapte également : expérimentation (déjà en cours) des amendes douanières pour les acheteurs de drogue, intensification de la surveillance sur internet, financement de matériel de pointe pour détecter les nouvelles drogues de synthèse, renforcement de la coopération européenne.
Enfin, face au développement des cannabiculteurs, le plan prévoit de "couper court aux idées reçues sur les vertus bio du cannabis issu de ces cultures", mieux informer le grand public sur l'existence d'"usines à cannabis" aux mains de réseaux criminels et intensifier la surveillance des canaux d'accès à la production locale (achat de graines, etc.).
Source : Plan gouvernemental de lutte contre la drogue et les conduites addictives 2013-2017 (pdf), sur le site de la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie.
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