Cancer du col de l'utérus : vacciner dès 9 ans ?
Moins de 25% des adolescentes sont vaccinées contre des souches du papillomavirus humain (HPV), responsable de cancers du col de l'utérus. Afin d'atteindre une couverture vaccinale efficace, le Haut Conseil de la Santé Public recommande, dans un avis publié le 10 septembre 2014, d'abaisser de deux ans l'âge de la vaccination contre le papillomavirus humain (HPV).
Les vaccins anti-HPV – qui protègent contre plusieurs souches du papillomavirus humain – ont démontré depuis plusieurs années leur efficacité pour la prévention du développement des verrues génitales. Certains de ces virus étant également responsables de l'apparition de lésions précancéreuses, des campagnes de vaccinations ont été initiées dans de nombreux pays en vue de réduire le taux de cancers du col de l'utérus.
Du fait de l'intervalle de temps important entre l'infection par le virus et la survenue du cancer, l'impact de la vaccination n'a pas pu être formellement évalué pendant longtemps. Des travaux d'épidémiologie, publiés ces derniers mois(1), ont montré une décroissance significative du nombre de cancers du col dans les premiers pays à avoir généralisé la vaccination précoce anti-HPV.
Dans un avis publié le 10 septembre 2014, le Haut Conseil de la Santé Publique constate qu'en France, la couverture vaccinale observée est très faible, "en baisse depuis 2010, et inférieure à 25% à 16 ans en 2013". Il observe en outre "une diminution marquée de l'initiation du schéma vaccinal entre 2011 et 2013 (avec une couverture vaccinale à une dose à 15 ans qui diminue de 26% à 18%)". Les populations les plus défavorisées sont également les moins vaccinées.
Les soupçons qui ont pesé en 2013 sur la dangerosité du vaccin – écartés par les études épidémiologiques, qui suggèrent au contraire un rôle protecteur contre les maladies auto-immunes – ont probablement influencé ce recul(2).
Quoi qu'il en soit, la couverture vaccinale apparaît aujourd'hui trop faible pour empêcher la propagation des papillomavirus dans la population. La vaccination anti-HPV n'est efficace que si elle survient avant l'exposition au virus.
Vaccins anti-HPV : plus de souplesse
Jusqu'en avril 2013, l'âge recommandé pour la première injection du vaccin était, en France, de 14 ans. A cette date, la période de vaccination conseillée a été officiellement élargie entre 11 et 14 ans, "une fourchette d'âge plus ample introduisant plus de souplesse [pour les médecins et les familles]".
Certains critiques ont alors objecté qu'une vaccination trop précoce pouvait être contre-productive, dans l'hypothèse où le vaccin perdrait de son efficacité au fil des ans. Là encore, des études récentes(3) montrent que les anticorps anti-HPV restent présents au moins huit ans après la vaccination chez les sujets testés.
Au vu de ces résultats et de ces constats, le Haut Conseil de la santé publique recommande désormais officiellement "la mise en place de modalités d'administration de la vaccination permettant d'atteindre un pourcentage élevé de jeunes filles, indépendamment de leur niveau social".
Le HCSP suggère ainsi que soit proposée une offre vaccinale en milieu scolaire, sur le modèle britannique et australien. En outre, il suggère l'abaissement de l'âge de la vaccination de 11 ans à 9 ans, comme c'est déjà le cas au Québec.
Favoriser le dépistage du papillomavirus
En France, le HCSP rappelait, en 2011, que la vaccination constituait une arme contre le cancer du col de l'utérus, mais "ne saurait en aucun cas remplacer [le] dépistage" (le HPV n'étant pas la seule cause de son développement). Toutefois, le Haut Conseil jugeait probable que les jeunes filles qui se font vacciner "[adhéreront] ultérieurement au dépistage".
Les dernières études portées à la connaissance du HCSP "[confirment] que les populations qui n'adhérent pas au dépistage et qui n'adhérent pas à la vaccination se recouvrent en partie, laissant ainsi une part significative de la population dénuée de toute prévention." Les experts voient donc dans l'élargissement de la vaccination un moyen de lutter contre une aggravation des inégalités sociales de santé en France.
* Vidéo : Entretien avec le Dr Joseph Monsonego, gynécologue. Le Dr Joseph Monsonego a fait partie des groupes de travail sur la vaccination HPV organisés par SPMSD et GSK, il a aussi coordonné les essais cliniques des deux vaccins en Franc.
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(1) Incidence of cervical lesions in Danish women before and after implementation of a national HPV vaccination program. Baldur-Felskov et coll. Cancer Causes Control. juill. 2014. doi:10.1007/s10552-014-0392-4. ; Early impact of human papillomavirus vaccination on cervical neoplasia--nationwide follow-up of young Danish women. B. Baldur-Felskov et coll., J Natl Cancer Inst. mars 2014. doi:10.1093/jnci/djt460. ; Reduction in human papillomavirus (HPV) prevalence among young women following HPV vaccine introduction in the United States, National Health and Nutrition Examination Surveys, 2003-2010. L.E. Markowitz et coll. J Infect Dis. août 2013 doi:10.1093/infdis/jit192.
(2) Dans son avis du 10 septembre 2014, Haut Conseil de la santé publique rappelle que "les données de pharmacovigilance disponibles, avec un recul de plus de sept ans, tant au plan national qu'international, ne permettent pas de retenir l'existence d'un lien de causalité entre cette vaccination et les événements indésirables graves qui lui ont été attribués en France, notamment la sclérose en plaques et d'autres maladies auto-immunes". "Ces croyances entretenues par certains médecins, et fortement relayées par les médias, ont suscité une défiance tout à fait injustifiée vis-à-vis de cette vaccination. Par ailleurs, le HCSP rappelle que les maladies auto-immunes se révèlent avec une fréquence significative à l'adolescence, à l'âge où la vaccination est également recommandée."
(3) Long-term Study of a Quadrivalent Human Papillomavirus Vaccine. Ferris D et coll. Pediatrics. Sept. 2014 doi:10.1542/peds.2013-4144.
Si l'absence d'une dangerosité propre aux vaccins anti-HPV est désormais établie, des critiques persistent quant à l'utilité de leur promotion massive dans les pays industrialisés – alors même que les cancers du col de l'utérus y sont bien diagnostiqués et traités, et que ces vaccins représentent un coût non négligeable pour les systèmes de santé.