Nous ne sommes pas tous égaux face au rhume
Le nez qui coule et un mouchoir à portée de main... Certains passent l'hiver la goutte au nez, d'autres à l'abri des maux... Face au rhume, nous ne sommes pas tous égaux. Et si tout cela n'était qu'une histoire de chromosomes ? C'est ce que des chercheurs américains observent dans une récente étude.
Et si le risque d'attraper un rhume se mesurait à la longueur de ses extrémités chromosomiques ? Voilà une idée originale qu'ont eue des chercheurs américains de l'université de Carnegie Mellon à Pittsburg. Ils ont lu dans les télomères, ces séquences ADN situées à l'extrémité des chromosomes, la sensibilité des hommes aux infections.
Télomère… Dis-moi si je vais tomber malade ?
Il faut savoir que les télomères raccourcissent avec l'âge. Or, ils interviennent justement dans la division cellulaire, et la réplication de l'ADN. Le problème, c'est que le télomère vieillit. Et en prenant de l'âge, il raccourcit, altérant ainsi la capacité de la cellule à se diviser. Le système immunitaire s'en trouve alors affaibli. On sait d'ailleurs qu'après 50 ans, les personnes se voient dotées d'extrémités chromosomiques plus courtes, et sont ainsi plus sujettes aux infections. Un phénomène que les chercheurs ont tenté de percer.
Ils ont sélectionné 152 patients, âgés de 18 à 55 ans, en bonne santé. Tous ont été placés en quarantaine, et des médecins leur ont administré des gouttes nasales contenant le virus du rhume. Les chercheurs ont ensuite observé leur système immunitaire pendant cinq jours. En parallèle, les chercheurs ont prélevé des cellules du système immunitaire, c'est-à-dire des globules blancs, et en ont extrait l'ADN, afin de mesurer la taille des télomères.
Résultats, sur les 152 patients, 105 ont été infectés par le virus, et seuls 33 d'entre eux ont exprimé les symptômes du rhume. Parmi les malades, 26% présentaient les télomères les plus courts. Une différence que les chercheurs jugent significative dans leur étude.
Le rhume vient en vieillissant ?
Il semble cependant que l'étude observe, mais ne démontre rien de surprenant. En effet, n'est-il pas logique de retrouver des télomères courts chez des patients âgés de 55 ans, par conséquent plus susceptibles aux infections ? La taille des télomères dépend de l'âge. C'est pourtant ce que les auteurs de cette expérience ont voulu mettre en évidence. Entre 18 et 21 ans, on n'observe aucune différence. Il faut attendre l'âge de 22 ans pour que les écarts commencent à apparaître et à se creuser toujours un peu plus avec le vieillissement.
La communauté scientifique reste perplexe face à un tel constat. Si certains trouvent l'idée intéressante, d'autres se montrent peu surpris. "Les télomères raccourcissent en vieillissant. Plus ils vieillissent, plus ils raccourcissent, et plus le système immunitaire s'affaiblit, souligne Dr Henri Agut, virologue.
Est-ce que les télomères peuvent justifier pour autant cette inégalité que l'on a tous face aux infections ? "Les télomères ne peuvent pas être la clé de toutes les explications, c'est impossible", affirme ce spécialiste des infections. "Il faudrait explorer d'autres facteurs, notamment les gènes qui gèrent le processus d’inflammation et du système immunitaire, et qui sont très nombreux".
Mieux contrôler le système immunitaire
La piste de recherche semble toutefois intéressante à explorer, en prenant en compte d'autres facteurs que les paramètres génétiques, comme l'environnement dans lequel on vit, les pathologies lourdes auxquelles nous pouvons être confrontés au cours de notre vie, etc.
Percer le mystère du système immunitaire pourrait aussi rendre service à certains malades, rappelle Dr Henri Agut, virologue à l'hôpital La Pitié-Salpêtrière. "Cela pourrait nous aider à protéger des patients d'infections graves, quand on les place sous chimiothérapie, ou lorsque l'on est contraint d'affaiblir leur système immunitaire pour faire tenir un greffon, par exemple", conclut-il.
Source : "Association Between Telomere Length and Experimentally Induced Upper Respiratory Viral Infection in Healthy Adults", JAMA, 20 février 2013
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