Resvératrol : un antioxydant star à la popularité usurpée ?
Depuis de nombreuses années, le resvératrol est paré de toutes les vertus. Mais si les aliments qui en contiennent en grande quantité (vin rouge, chocolat noir, divers fruits...) ont des bénéfices avérés pour la santé, le resvératrol lui-même n'y serait pour rien ! Tel est, en tout cas, la conclusion d'une étude publiée le 12 mai 2014 dans le JAMA Internal Medicine, menée sur les habitants d'une région viticole italienne.
En 1998, 783 habitants d'une région viticole italienne, âgés de plus de 65 ans, ont été intégrés à une étude relative aux effets du mode de vie sur le vieillissement. Le taux de resvératrol (et de sous-produits de cet antioxydant) dans leurs urines avait alors été mesuré par les chercheurs.
Onze ans plus tard, les chercheurs ont constaté que les personnes présentant les taux de resvératrol les plus élevés... ne vivaient pas plus longtemps et n'avaient pas moins de maladies cardiovasculaires ou de cancers que ceux présentant de faibles taux de cet antioxydant !
Selon Richard Semba, principal auteur de cette recherche, "l'histoire du resvératrol s'avère être un nouveau cas d'une substance ayant fait l'objet d'un énorme battage médiatique quant à ses bienfaits pour la santé, [alors que ces bienfaits] ne se confirment pas."
L'emballement pour le resvératrol est né de travaux menés sur la souris chez qui cette substance, administrée purifiée et à haute dose, présente de puissants effets anti-inflammatoires.(1)
Effets bénéfiques malgré tout
Si les résultats négatifs de l'étude du professeur Semba venaient à être confirmés, il ne faudrait pas pour autant renier les vertus du vin rouge, du chocolat noir et des baies. De nombreuses études confirment en effet que leur consommation (à des doses modérées, pour le vin rouge) réduit effectivement les risques inflammatoires et a des effets protecteurs sur le cœur.
"Ces effets bénéfiques [proviennent vraisemblablement] d'autres polyphénols ou substances trouvées dans le vin et ces aliments", juge le Dr Semba. "Il s'agit d'aliments complexes et tout ce que nous pouvons dire, avec les résultats de notre étude, c'est que ces bienfaits ne proviennent sans doute pas du resvératrol", souligne-t-il.
L'intérêt d'une utilisation thérapeutique du resvératrol administré à haute dose n'est pas nécessairement remis en question par ces travaux. En revanche, le rôle de ce composé dans le "paradoxe français" (faible incidence des maladies coronaires dans l'hexagone en dépit de régimes riches en cholestérol et en graisse saturées) semble avoir été très largement surestimé.
Source : Resveratrol Levels and All-Cause Mortality in Older Community-Dwelling Adults. Richard D. Semba et coll. JAMA Intern Med. May 12, 2014. doi : 10.1001/jamainternmed.2014.1582