Les soignants non-vaccinés réintégrés
C’est aujourd’hui que les hôpitaux et établissements de soins peuvent réemployer les soignants non-vaccinés contre le Covid-19, suspendus il y a près de deux ans. Mais la profession reste divisée sur cette décision.
C’était le 4 mai dernier à l’Assemblée nationale, les députés ont discuté de l’abrogation de la loi qui oblige les soignants à se vacciner contre le Covid-19.
"Aujourd'hui, il n'y a plus d'état d'urgence, nous avons des retours d'expérience concernant l'efficacité des vaccins. La HAS elle-même, considère que plus de 80 % des personnels n'ont pas leur schéma vaccinal complet aujourd'hui. Il n'y a donc pas de raison que nous n’abrogions pas cette loi", explique Jean-Victor Castor, rapporteur de la commission des affaires sociales (GDR-NUPES).
L’abrogation de l’obligation vaccinale a donc été adoptée en première lecture contre l’avis du gouvernement. Cette décision doit maintenant être discutée au Sénat. La suspension, elle, était déjà prévue par décret ministériel.
"On nous traite encore de complotistes"
Catherine et Matthieu, infirmière en soins palliatifs et infirmier en psychiatrie dans le Tarn, pourraient donc reprendre du service dès aujourd’hui.
"Il me tarde de pouvoir mettre mes compétences au service de mes patients, ça me manque. 18 mois sans salaire, sans rien, ce sont les huissiers qui sont devenus nos meilleurs amis. On ne peut plus rien payer, on ne peut plus s'acheter une baguette de pain, il faut tout calculer", explique Catherine Bouisson, infirmière non vaccinée suspendue.
De son côté, Matthieu Baïsse souhaiterait lui aussi reprendre son poste d’infirmier.
"On est le dernier pays qui n'a pas réintégré ses soignants. Dans certains pays, ils ont réintégré les soignants, ils ont rendu les salaires, il y a eu des excuses et nous, on nous traite encore de complotistes", commente Matthieu Baïsse, infirmier non vacciné suspendu.
"C'est incompatible avec l'exercice d'une profession soignante "
Ces soignants, suspendus en milieu hospitalier, seraient assez peu nombreux, 5 à l’APHM à Marseille sur 18000 professionnels ou encore 15 soignants au CHU de Bordeaux sur 15 000 salariés. En tout, ils seraient environ 4 000 selon la Fédération Hospitalière de France. Ce syndicaliste infirmier reste contre leur réintégration.
"Nous avons visiblement des gens qui ont fait une erreur de casting. Ils ont tout à fait le droit d'avoir leurs croyances, mais c'est incompatible avec l'exercice d'une profession soignante où justement la prévention, la promotion de la santé, la vaccination et la santé publique sont des données fortes et incontournables", explique Thierry Amouroux, porte-parole du Syndicat Nationale des Professionnels Infirmiers.
Une réintégration pour quelles fonctions ?
D’autres soignants se positionnent plutôt en faveur de la réintégration, mais dans des services où la prévention est moindre.
"Il est très clair que de tels personnels ne pourront pas être intégrés dans des postes où la mission est importante comme dans un centre de vaccination ou dans un centre s'occupant de personnes immunodéprimées ou avec de lourdes morbidités. À l'inverse, il est possible de les intégrer dans des services de chirurgie générale, d'orthopédie ou de consultation", confie le Pr Bruno Mégarbane, chef du service réanimation, hôpital Lariboisière.
Une fois cette réintégration effectuée, l’hôpital public devra s’attaquer à d’autres enjeux majeurs. Plus de 3 ans après le début de l’épidémie de Covid-19, il reste en grande difficulté.