Ozempic : pourquoi il ne faut absolument pas en prendre avant une opération

Depuis plusieurs mois, ce médicament antidiabétique est détourné de son usage pour faciliter la perte de poids. Si la prise d’Ozempic n’est pas sans effet pour la santé, elle peut même s’avérer dangereuse juste avant une opération. On vous explique.

Mathis Thomas
Mathis Thomas
Rédigé le , mis à jour le
Médicaments : attention aux risques de l'auto-médication
Médicaments : attention aux risques de l'auto-médication  —  Allodocteurs - Newen Digital

Produit star de TikTok, avec plus d’un milliard de vues cumulées sous le mot-clé #Ozempic, l’usage détourné de cet antidiabétique n’en finit plus d’alerter le corps scientifique. Le 1er mars dernier, l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) annonçait que l’Ozempic faisait désormais l’objet d’une “surveillance renforcée”, tout en rappelant que son utilisation était réservée aux personnes diabétiques.

Plus récemment, le 8 juin 2023, l’Anesthesia Patient Safety Foundation (APSF), une organisation de professionnels de santé spécialisée dans l’anesthésie, a publié une newsletter pointant du doigt les effets de la prise d’Ozempic par les patients avant une opération.

À quoi sert l'Ozempic ?

Le sémaglutide, le principe actif de l’Ozempic, agit en se fixant sur les récepteurs gastriques d'une hormone qui a un rôle dans le contrôle de la glycémie et stimule la libération d'insuline lorsque le taux de glucose dans le sang est élevé.   

Or, ce principe actif ralentit également la vidange de l'estomac, diminuant donc l'appétit et engendrant des pertes de poids importantes, de l'ordre de 10% en un an. Chez les patients soumis à une anesthésie, le contenu gastrique peut alors être retenu, alerte l’APSF. Même pour les patients à jeun préopératoire depuis plusieurs heures.

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Des contenus solides malgré un jeûne de 18 heures

L’organisation sanitaire appelle les médecins anesthésistes à “être conscients des risques potentiels de ces médicaments pour les patients recevant une anesthésie”. L’APSF donne l’exemple d’une femme de 60 ans, s’étant présentée pour une IRM (imagerie par résonance magnétique) avec sédation pour une claustrophobie. 

La patiente avait des antécédents d’hypertension et était en surpoids. Le mois précédent son IRM, elle avait commencé à prendre de l’Ozempic pour la perte de poids. Malgré un jeûne de matière solide de 18 heures, une échographie gastrique a révélé la présence de contenus gastriques solides, causés par le ralentissement de la vidange gastrique de l’estomac. Et ce, alors même que sa dernière dose d’Ozempic remontait à sept jours.

Épisode de vomissements volumineux

L’autre cas partagé dans la newsletter concerne une patiente de 50 ans ayant des antécédents médicaux d’obésité, de diabète de type 2, d’hypertension et d’apnée du sommeil. Également sous Ozempic pour perdre du poids, elle a vu son opération pour une hystérectomie se dérouler sans encombre, jusqu’au réveil de l’anesthésie.

Alors même qu’elle jeûnait depuis la veille de son opération et qu'une sonde oro-gastrique lui avait aspiré les contenus gastriques de son estomac, la patiente a été prise de vomissements quelques minutes après son réveil. Un épisode de vomissements volumineux, correspondant à de la nourriture avalée plusieurs jours avant l’opération.

Les vomissements de la patiente, pourtant à jeun depuis la nuit précédant l'opération
Les vomissements de la patiente, pourtant à jeun depuis la nuit précédant l'opération  —  APSF

Un risque d'aspiration pulmonaire "préoccupant"

Bien que cela ait été évité dans ces cas, le risque d'aspiration pulmonaire chez les patients sédatés ou anesthésiés avec des voies respiratoires non protégées est préoccupant”, alerte l’APSF. L'aspiration pulmonaire correspond en effet à l'inhalation du contenu de l'estomac dans le larynx et les voies respiratoires et expose à un risque d'étouffement.

L’organisation souhaite donc “réévaluer les directives traditionnelles concernant le jeûne” chez ces patients. “L'utilisation de l'échographie gastrique pour évaluer le contenu gastrique avant l'anesthésie peut être envisagée chez les patients prenant ces médicaments, lorsque cela est possible”.

Des études complémentaires nécessaires

Même si les deux patientes présentaient de nombreux autres facteurs de risque, l’APSF appuie que “les professionnels de l'anesthésie doivent être conscients de ces médicaments et des risques potentiels qu'ils présentent pour les patients recevant une anesthésie”. 

Des études supplémentaires sur la sécurité de l'utilisation de ces agents dans le contexte de la gestion péri-anesthésique sont nécessaires”, conclut l’APSF. 

Alerte sur l'utilisation détournée d'un antidiabétique pour maigrir
Alerte sur l'utilisation détournée d'un antidiabétique pour maigrir  —  Le Mag de la Santé - France 5