Explosion au gaz à Paris : les victimes ont "des montées d'angoisse de façon permanente"
Après l'explosion provoquée par une fuite de gaz, une cellule de soutien psychologique a été mise en place pour les victimes. Entre le bruit, les scènes de panique et les dégâts dans leurs domiciles, certains rescapés sont traumatisés.
Quatre morts, une cinquantaine de blessés et des dégâts impressionnants en plein coeur de Paris. Samedi matin, une fuite de gaz dans une boulangerie a provoqué une explosion dévastatrice dans le 9ème arrondissement de la capitale. Les victimes évoquent un bruit assourdissant et des scènes de guerre. Pour leur venir en aide, une cellule psychologique a été mise en place. Le point avec la psychologue Carole Damiani. Elle dirige l'association Paris Aide aux Victimes et participe à la cellule de soutien.
- Comment vont les rescapés que vous avez pris en charge ? De quoi souffrent-ils ?
C. Damiani : "La plupart des rescapés souffrent d'un syndrome psycho-traumatique, qui est appelé à se développer dans les jours à venir, avec cette scène, qu'ils appellent très souvent une scène de guerre, qui revient constamment devant leurs yeux. Ils ressentent une très grande anxiété de retourner sur les lieux, parce que pour eux, il n'y a plus de lieu de sécurité possible. Et ils n'arrêtent pas d'y penser. C'est très angoissant. Ils ont des montées d'angoisse de façon permanente. Mais ce qui est particulier pour ces victimes d'incendie ou d'explosion par rapport à d'autres, c'est que leur préoccupation en ce moment, c'est où est-ce que je vais dormir ce soir, demain et après-demain."
- Ce qui est particulier dans ce drame, c'est que le domicile est touché. Or, c'est habituellement un lieu de sécurité, d'intimité. Une sorte de cocon. Le fait de ne pas pouvoir rentrer chez soi amplifie-t-il les difficultés des personnes touchées ?
C. Damiani : "C'est très angoissant, d'autant que certains ont laissé des animaux domestiques. Des enfants ont laissé leur doudou. C'est douloureux pour eux. Ils ont besoin de sécurité. Et de savoir qu'ils ne peuvent pas retourner sur les lieux, c'est angoissant."
- Certaines victimes ont d'abord cru à un attentat. Le contexte actuel amplifie-t-il l'angoisse ?
C. Damiani : "Beaucoup ont dit : j'ai cru que c'était un attentat. C'est la première pensée qui leur est venue. Mais après, cette histoire d'explosion avec cette conduite de gaz, c'est quelque chose qui est partout dans Paris. Certains se sont dit : « je vais aller dans un autre lieu, est-ce que cela ne peut pas se reproduire aussi ». Donc, ils ont cette idée que cela peut se reproduire constamment."
- Il y avait aussi des hôtels à proximité de l'immeuble qui a explosé. Une touriste espagnole fait d'ailleurs partie des quatre victimes décédées. Quels sont les problèmes particuliers des touristes ?
C. Damiani : "Pour eux, effectivement, c'était quelque chose auquel ils ne s'attendaient pas du tout. Et, en plus, ils ont ce souci de retourner dans leur pays. Mais, sans papiers, sans leurs cartes d'embarquement qui sont restés dans leur hôtel... Donc, ils sont face à une grande incertitude sur comment le faire. On leur a conseillé plutôt d'attendre ici, de voir comment ils pouvaient récupérer certaines de leurs affaires et de repartir après."
- Comment fonctionne la cellule de soutien ? Qui peut venir vous voir ?
C. Damiani : "Il y a deux types de victimes. Il y a celles qui ont été blessées et qui font l'objet d'une liste qui a été établie. Nous prenons contact directement avec elles pour qu'elles n'aient pas à chercher. Et puis, il y a les riverains qu'il est plus difficile de lister. Mais il y a cette permanence à la mairie du 9ème arrondissement qui leur permet de consulter, sans avoir à chercher, à la fois un psychologue, un juriste, une assistante sociale. C'est un guichet unique."