Trop de pornographie perturberait l'érection

Rares sont les études qui évaluent le retentissement de la pornographie sur la sexualité. Une équipe a étudié les troubles sexuels associés à la pornographie chez des hommes hétérosexuels de moins de 40 ans. Les résultats sont publiés dans le Journal of Sexual Medicine.

Dr Charlotte Tourmente
Dr Charlotte Tourmente
Rédigé le , mis à jour le
Trop de pornographie perturberait l'érection
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Devant l'augmentation de la fréquence de la dysfonction érectile (trouble de l'érection) chez les hommes jeunes, certains ont mis en cause l'usage plus fréquent de la pornographie. Les auteurs de l'étude ont analysé les associations entre les difficultés sexuelles et la pornographie à travers  des échantillons masculins de trois pays européens différents, et à l'aide de deux études.

La première étude concerne 2.727 hommes croates, norvégiens et portugais, qui ont répondu à un questionnaire en ligne en 2011. Ils ont été recrutés à l'aide de bannières sur des sites de santé. Les troubles de l'érection, une difficulté à atteindre l'orgasme et un manque de désir sexuel ont été évalués à l'aide des indicateurs  du "Global Study of Sexual Attitudes and Behavior indicators".

Résultat : une petite association chez les hommes croates entre la dysfonction érectile et la pornographie a été retrouvée ; l'utilisation modérée et peu fréquente de la pornographie augmentait la probabilité de souffrir d'un trouble de l'érection. Est-ce pour compenser une vie sexuelle peu satisfaisante du fait d'un trouble de l'érection que les hommes utilisaient des images pornographiques ? Ou est-ce la pornographie qui a provoqué les difficultés érectiles ? La question est posée.

Les auteurs temporisent toutefois leurs conclusions par celles de la seconde étude qui ne retrouve aucune association.

Elle étudie 1.211 Croates, recrutés par l'intermédiaire de Facebook en 2014. La dysfonction érectile a été évaluée à l'aide de l'index international, International Index of Erectile Function, un index beaucoup plus complet que celui utilisé lors de la première étude. L'éjaculation retardée et le manque de désir ont également été recherchés. Aucune association n'a été retrouvée.

Les limites de l'étude

Il s'agit d'une étude transversale (autrement dit, on étudie une population à un instant T). L'échantillon des deux études n'est pas forcément représentatif de la population. Il peut y avoir un biais du fait du mode de sélection (questionnaires en ligne sur des sites de santé ou par Facebook et une personne souffrant d'un trouble sexuel peut se sentir plus concerné par une enquête à ce sujet). Autre limite : le type de pornographie et la durée qui n'ont pas été pris en compte.

Les auteurs concluent donc que les craintes à propos de la pornographie ne sont peut-être pas complètement justifiées et arguent que d'autres facteurs tels que le mode de vie, l'abus de certaines substances, le stress, la dépression, un manque d'intimité, jouent un rôle important dans la survenue d'une dysfonction érectiles.

Ils estiment que des études plus globales, prenant en compte ces différents facteurs, au même titre que la pornographie, seraient particulièrement intéressantes.

Source : Is Pornography Use Associated with Sexual Difficulties and Dysfunctions among Younger Heterosexual Men? J Sex Med 2015 May;12(5):1136-9. doi: 10.1111/jsm.12853. Epub 2015 Mar 26.