Téléconsultations : les nouvelles règles liées à l'épidémie de Covid-19
Avec le confinement et l’explosion des besoins médicaux, la téléconsultation est devenue une alternative incontournable. Quand peut-on consulter un médecin à distance ? Combien ça coûte ? Quelle sera l'évolution une fois la crise passée ?
Avant cette crise, qui connaissait vraiment la téléconsultation et qui savait que cela pouvait être pris en charge par la Sécurité Sociale ? Très peu de patients la connaissaient et beaucoup de médecins étaient réticents, convaincus que c’était un outil réservé aux geeks. C’était avant, car en quelques semaines à peine, la télémédecine a fait une entrée fracassante dans nos vies.
Un nombre de téléconsultations multiplié par 100
Les chiffres sont spectaculaires. Nous sommes passés de 10.600 téléconsultations facturées par semaine début mars, à 1.119.000 début avril (semaine du 6/04). Ça a été multiplié par 100 ! Évidemment, cette explosion est liée au confinement et à la fermeture des cabinets médicaux, la peur d’être contaminé, l’obligation de distanciation sociale… tout ça fait que les téléconsultations sont presque devenues la seule solution possible pour se faire soigner.
Un essor rendu possible grâce à un assouplissement des règles de prise en charge
Ces règles ont été définies en septembre 2018, quand la téléconsultation a été reconnue officiellement. La règle principale, c’est que si une personne veut être remboursée par la Sécurité sociale, elle est obligée de téléconsulter son médecin traitant ou un médecin qui l'a déjà vue au cours des 12 derniers mois.
Avec l’épidémie, le gouvernement a fait sauter ce verrou pour ralentir la propagation du virus.
Depuis mars, si un patient pense avoir des symptômes de Covid, il peut téléconsulter n’importe quel médecin. Dans les faits, la Sécurité sociale n’est pas en mesure de vérifier chaque motif de consultation, donc en ce moment toutes les téléconsultations, quel que soit le motif (Covid ou pas) peuvent être faites avec le médecin de son choix.
Autre changement fondamental, avant l’épidémie, les téléconsultations (même tarif que la consultation normale) étaient remboursées comme une consultation classique : 70% par la Sécu et 30% par la mutuelle. Elles sont maintenant toutes remboursées à 100% (hors dépassement d'honoraires). Ça a aidé les patients à sauter le pas.
Le gouvernement a assoupli les modalités de réalisation des téléconsultations
Le but était de permettre à un maximum de patients et de médecins (même ceux non équipés) de pouvoir faire ces consultations à distance. Concrètement, avant l’épidémie, les téléconsultations devaient obligatoirement se faire via des sites spécialisés, utilisant des serveurs ultra sécurisés. Depuis mars, c’est terminé, on peut consulter un médecin depuis son canapé juste avec un smartphone, sur Skype, Whats app ou Face Time. Idem pour l’envoi d’ordonnances ou d’arrêts de travail, si nécessaire à la fin de la téléconsultation, le médecin peut le faire tout simplement par mail alors qu’avant il devait passer par un serveur sécurisé.
Les autorités ont lâché encore plus de lest pour les patients fragiles (malades Covid, ALD, + de 70 ans, femmes enceintes) ou vivant en zone blanche. Désormais, ils ont le droit de téléconsulter par téléphone, sans même voir le médecin par écran interposé. En théorie, ces nouvelles règles ne s’appliquent que jusqu’au 31 mai.
Les motifs de téléconsultations en cette période d’épidémie
Plus de 80% des téléconsultations ont été faites avec le médecin traitant, et même si c’est impossible pour la Sécurité sociale de connaître le motif précis de chaque consultation, on peut imaginer que dans beaucoup de cas c’était pour une suspicion de Covid. Pour le reste, les motifs sont très variables . Selon le leader de la télémédecine (Doctolib), les spécialistes les plus sollicités en cette période d’épidémie ont été les psychiatres, les dermatologues et les gynécos parfois pour un problème urgent (lésion cutanée suspecte, infection gynéco…) mais aussi beaucoup pour du suivi de maladies chroniques (ajustement d’un traitement psychiatrique…). Les mêmes limites qu’avant l’épidémie sont évidemment valables, la téléconsultation ne fonctionne pas dès lors qu’il y a besoin d’un examen clinique . On ne peut pas palper un ventre, ou ausculter des poumons par écran interposé.
Covid ou pas, en téléconsultation dès que le médecin a un doute, il demande au patient de venir au cabinet ou d’aller aux urgences.
Quel avenir pour la téléconsultation une fois la crise passée ?
La courbe s’est déjà bien tassée depuis le déconfinement. Cela devrait continuer à décroître avec le retour au cadre réglementaire normal. La Sécurité sociale ne cesse de dire qu’elle ne va pas garder les vannes grandes ouvertes une fois l’épidémie terminée. C’est logique, ce serait totalement inéquitable de continuer à rembourser les téléconsultations à 100% alors que les consultations classiques le sont à 70%. Elle devrait aussi "serrer la vis" sur les modalités pratiques . C'est peu probable qu’elle continue à rembourser des téléconsultations faites par Whats app sans aucune garantie sur la sécurité des données médicales. Tout cela devrait freiner cette explosion des téléconsultations.
Malgré tout, l’épidémie a permis de franchir un cap psychologique. Tous ceux qui pensaient que la télémédecine était une médecine au rabais, ont pu réviser leur jugement. Même si une consultation par écran interposé ne remplacera jamais une consultation physique, cette crise a montré que la télémédecine avait toute sa place. Entre le vieillissement de la population, l’avancée des déserts médicaux et les contraintes budgétaires de plus en plus fortes, elle devrait même devenir un maillon indispensable de notre système de santé.