"Je suis bruyante pendant les rapports sexuels", que faire ?
Il existe sûrement des questions que vous n'avez jamais osé poser, par pudeur, crainte, voire même honte... Notre journaliste, Mélanie Morin, a posé ces questions à votre place. Aujourd'hui, il est question d'un nouveau complexe, les vocalises coïtales d'une jeune femme.
Lorsqu'on fait une recherche sur Internet avec l'expression "Je fais du bruit pendant", on tombe sur "Je fais des bruits pendant mon sommeil", "Je fais trop du bruit pendant l'amour", "Je fais du bruit en buvant", "Je fais du bruit pour qu'on m'écoute"... La recherche "Je fais trop de bruit pendant l'amour" génère près de 6.690.000 résultats sur Internet.
L'intensité des cris est-elle corrélée au plaisir ressenti ?
Quand une femme éprouve un plaisir certain, les sensations sont dues à un petit gland érectile car oui messieurs, les femmes en possèdent un : c'est le fameux clitoris qui forme une sorte d'arche. Il est pourvu de branches renfermant des corps caverneux et des bulbes qui entourent le vagin. Toute cette zone contient de très nombreuses fibres nerveuses, d'où sa sensibilité. Lors de la pénétration, le pénis stimule, via la paroi vaginale, le corps caverneux et le bulbe du clitoris. Cela peut aussi être stimulé manuellement bien sûr.
Il s'agit d'une zone propice au plaisir pour de nombreuses femmes. Si on grimpe encore sur l'échelle du plaisir, on peut évoquer son paroxysme : l'orgasme. Quand il se produit, on observe un basculement de l'utérus vers l'arrière pour se positionner dans l'axe du vagin, les muscles se contractent et le cerveau libère les fameuses hormones du plaisir, les endorphines qui accompagnent la jouissance.
En général, au moment où les partenaires lâchent prise, une certaine désinhibition intervient. On perd un peu le contrôle, le corps s'exprime librement et cela peut effectivement s'accompagner de soupirs, de gémissements voire de cris parfois bruyants. Selon les sexologues, on ne peut pas affirmer que les décibels produits par une femme lors d'un coït sont proportionnels au plaisir ressenti. Cela est très variable selon les personnes. On peut aussi éprouver du plaisir de façon beaucoup plus silencieuse, sans compter la part de simulation qui peut intervenir et qui est difficilement quantifiable. Nous ne sommes pas des machines, on ne peut pas tout objectiver...
Des gémissements qui ont fait l'objet d'une étude
Deux chercheurs britanniques se sont penchés en 2011 sur les "vocalises ou vocalisations copulatoires" : Evidence to Suggest that Copulatory Vocalizations in Women Are Not a Reflexive Consequence of Orgasm - Archives of Sexual Behavior. Ils ont interrogé 71 femmes hétérosexuelles qui manifestaient leur plaisir de façon sonore. Elles éprouvaient davantage de plaisir lors de la stimulation du clitoris et moins lors de la pénétration. Et elles avaient tendance à "vocaliser" avant et pendant l'éjaculation de leur partenaire, sans que ce soit pile-poil corrélé à leur plaisir à elles.
Le fait que certains cris des femmes n'intervenaient pas pendant leur orgasme à elles mais plutôt de façon très rapprochée de l'orgasme masculin était une forme "d'encouragement" envers ces messieurs. Cela a été considéré d'un côté comme une récompense, une façon de booster l'égo du partenaire et d'un autre côté comme une façon de suggérer au partenaire de terminer le rapport sexuel. Tirer cette conclusion un peu caricaturale d'un échantillon très mince de 71 femmes a agacé plus d'un sexologue.
Une vision "clichée" de la sexualité féminine
Selon un sexologue, d'après ce raisonnement, on a affaire à un "homme agissant" et à une "femme gémissante", un homme qui s'active sexuellement et une femme qui reste un peu passive et "vocalise" pour "faire quelque chose". Cela soulève la question du comportement social de la sexualité, c'est-à-dire la manière dont on manifeste son plaisir à autrui...
On a coutume de penser que les hommes sont moins expressifs pendant l'amour, que leur plaisir est "intériorisé", de même que dans la vie, ils sont censés "moins exprimer" leurs sentiments, leurs émotions. Cette construction sociale intervient dès le plus jeune âge et il serait pertinent de la repenser selon les spécialistes. Il n'existe pas d'éléments biologiques, physiologiques, concrets qui permettent de dire que les femmes sont plus bruyantes que les hommes lors des relations sexuelles.
Que faire en cas de rapports trop bruyants ?
"Ressentir beaucoup de plaisir" prouve que les rapports sont satisfaisants. On suppose qu'il n'y a pas de simulation et qu'il y a un lâcher prise, et c'est une bonne chose. Mais si plusieurs partenaires soulignent le bruit lors des rapports, cela signifie qu'ils ont été gênés, perturbés et il faut aussi en tenir compte. Un sexologue explique que le coït est un échange social au cours duquel on peut dire ce qui nous pose problème.
Il existe une image rigolote qui explique qu'au cours d'une réunion ou dans un open space, si quelqu'un parle trop fort, cela peut gêner les autres, et dans ce cas, on lui fait remarquer de manière polie, en y mettant la forme. Il faut donc trouver le bon équilibre. Cela peut aider à faire le tri parmi les amants compréhensifs et dotés d'humour, et les autres qui se montreraient désagréables en vous faisant des reproches sur vos vocalises coïtales. Il ne faut pas rester bloquée sur les remarques faites. Une forme de franchise est en tout cas appréciée par les prochains partenaires, il faut donc en parler avec humour. Faire du bruit, c'est humain.
Vous pouvez retrouver les conseils de notre sexologue Charlotte Tourmente sur notre site : Pourquoi certaines femmes crient-elles pendant l’amour ? Pour réprimer ces cris, elle conseille notamment de "se concentrer sur autre chose que le plaisir (la liste de courses, les activités du lendemain, le plat de pâtes du dîner, etc.)" ou d'"être bâillonnée par la main de son amant (ou son amante)". Ce jeu de domination-soumission est une option à double tranchant qui risque de redoubler les ardeurs de la "chanteuse lyrique". Entre adultes consentants, vous faites bien comme vous voulez.
N'hésitez pas à envoyer vos questions gênantes par mail : melanie@allodocteurs.fr