Conduite sous antidépresseurs, attention danger !
La prise d'antidépresseurs, en début de traitement ou après modification, entraîne un risque accru d'accidents de la route, selon une étude conduite par l'Inserm, en collaboration avec l'Agence du médicament (ANSM), qui recommande la plus grande vigilance.
Cette observation a été faite sur un ensemble de 72 685 conducteurs impliqués dans des accidents corporels de la route entre 2005 et 2008. Les chercheurs ont croisé les fichiers de police sur les accidents de la route avec blessés et ceux de l'Assurance-maladie pour déterminer les médicaments prescrits à ces conducteurs dans les jours précédant l'accident.
Ils ont trouvé un risque accru d'accidents de 34 % pour les 2 936 conducteurs qui avaient pris au moins un antidépresseur la veille de l'accident.
Mais ils ont surtout montré que le risque était maximum, de l'ordre de 49 % en plus, au moment de la mise en route du traitement et qu'il était également augmenté de 32 % lors de sa modification.
"Il y a des périodes pendant lesquelles il faut être particulièrement vigilant et les praticiens doivent prévenir leurs malades quand ils débutent ou changent un traitement", selon Emmanuel Lagarde, co-auteur de l'étude parue dans la revue spécialisée Journal of Clinical Psychiatry.
M. Lagarde, qui dirige une équipe Inserm à Bordeaux sur les traumatismes, relativise en revanche le risque global attribué aux antidépresseurs dans les accidents de la route, estimant qu'il est difficile de déterminer s'ils sont liés au médicament ou à l'état dépressif.
"A mon avis, il n'y a pas d'effet médicament sur le long terme, les gens qui sont sous antidépresseurs ont plus d'accidents effectivement, mais pas à cause du médicament", juge-t-il avant d'ajouter qu'il ne faut "surtout pas dire aux gens de ne pas prendre d'antidépresseurs lorsqu'ils conduisent" car "ce serait la catastrophe".
Les boîtes d'antidépresseurs vendues en France comportent un pictogramme de niveau 2 invitant les conducteurs à être "très prudents" et à ne pas conduire sans l'avis d'un professionnel de santé. Le niveau 3 déconseille formellement la conduite automobile.
Les premiers résultats de l'étude conduite par Ludivine Orriols de l'Inserm avaient été publiés en 2010. Ils avaient mis en évidence la pertinence du système des pictogrammes de niveau 2 et 3 pour les usagers et permis d'estimer à environ 3 % le pourcentage d'accidents de la route attribuables à une consommation de médicaments.
Parmi les médicaments les plus susceptibles de provoquer un accident arrivent en tête les benzodiazépines (utilisés comme anxiolytiques ou pour dormir) qui doublent le risque, largement devant les antiépileptiques, les hypnotiques apparentés aux benzodiazépines, les antidépresseurs ou les substituts opiacés.
L'étude devrait se poursuivre dans les années à venir, sous la forme d'un observatoire épidémiologique de grande envergure, a encore indiqué M. Lagarde.
En savoir plus
- Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM)
Communiqué du 29 août 2012 : "Consommation d'antidépresseurs et risque d'accident de la route : une vigilance particulière est requise lors de l'initiation ou de la modification du traitement".