Implants vaginaux défectueux : une enquête est ouverte
Une quarantaine de victimes d’implants vaginaux ont réussi à obtenir l’ouverture d’une enquête à Paris. Elles affirment ne pas avoir été informées des risques liés à ces dispositifs médicaux.
Les mêmes douleurs de "déchirement de l'intérieur", le même sentiment d'avoir été dupées puis abandonnées. Une quarantaine de patientes ont obtenu l'ouverture d'une enquête à Paris. En cause : le développement de graves effets secondaires (incontinence, infections, saignements, lésions, douleurs chroniques...) après la pose d'implants vaginaux contre l'incontinence urinaire et les descentes d'organe. Elles estiment ne pas avoir été informées des risques de complications irréversibles.
Depuis le 20 avril 2021, une enquête préliminaire est ouverte pour tromperie aggravée et blessures involontaires. Elle a été confiée à l'Office de lutte contre les atteintes à la santé publique (OCLAESP), selon le parquet de Paris.
"Une solution idéale" devenue solution cauchemardesque
En décembre 2019, Catherine M. sort d'une opération d'une trentaine de minutes avec une bandelette, un petit filet en polypropylène installé sous l'urètre, censée résoudre son incontinence urinaire à l'effort. L'implant lui avait été présenté comme la "solution idéale, en ambulatoire", raconte à l'AFP cette institutrice quinquagénaire, lors d'une rencontre avec d'autres plaignantes assistées de leurs avocates.
Pourtant, Catherine, amère, confie : "j'ai toujours fait confiance aux médecins". Et très vite, son état de santé se dégrade : une vive "douleur électrique" dans le bassin et la hanche gauche, "comme si elle était écartelée, qui irradie jusque dans le pied". Impossible de s'asseoir, d'avoir une vie sexuelle, de marcher. S'ensuivent un arrêt maladie de six mois et une dépression : "je leur en veux de ne pas m'avoir informée qu'on ne pourrait pas l'enlever", dit-elle.
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"Je n'ai jamais eu de document de consentement"
Certaines patientes ont voulu se faire enlever leur implant devenu trop douloureux, souvent sans succès. Marie-Christine S. a ainsi subi sept opérations depuis la pose de sa prothèse en 2002, selon les éléments portés à la justice. Me Laure Heinich, une des avocates des victimes, regrette :"ce sont vraiment des corps sacrifiés".
Une autre victime témoigne : aujourd'hui âgée de 40 ans, elle a été opérée en novembre 2019 pour un prolapsus. "J'ai un implant dont je n'ai jamais voulu, je n'ai jamais eu de document de consentement", déplore-t-elle, très émue.
Des risques "dissimulés"
Toutes font partie de la quarantaine de femmes, âgées de 40 à 80 ans, qui ont signé deux plaintes contre X - en 2020, puis 2021 - pour des faits s'étalant de 1995 à 2019.
Le 22 juillet 2024, France Inter révèle que depuis 2020, 113 femmes ont désormais porté plainte contre X pour "tromperie" et "blessures involontaires" après la pose d'un implant vaginal.
Les plaignantes soutiennent que les laboratoires ont sciemment minimisé voire dissimulé les risques que présentaient leurs dispositifs, notamment les difficultés - même l'impossibilité - de les enlever. La filiale de Johnson & Johnson dans une déclaration transmise à l’AFP, se défend : "Ethicon a agi de bonne foi en se basant sur des preuves scientifiques rationnelles concernant la recherche, le développement et la commercialisation de notre produit".
Les implants vaginaux, qu’est-ce que c'est ?
Ces implants vaginaux se présentent généralement sous forme de bandelettes, posées par voie vaginale ou abdominale. Ce sont des dispositifs médicaux développés depuis la fin des années 1990. Ces implants sont destinés au traitement de l'incontinence urinaire et des prolapsus (descente) des organes pelviens - un phénomène "généralement pas dangereux" et sans "risque d'aggravation rapide" selon la Haute autorité de santé (HAS). Une fois posés, ils s'incorporent aux tissus.
Selon le site de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), environ 50 000 dispositifs sont vendus annuellement en France, les deux tiers pour traiter l'incontinence urinaire. En 2019, huit des 19 fabricants se partageaient près de 90% du marché.