Pourquoi le variant sud-africain inquiète les scientifiques ?
Le nouveau variant sud-africain comporte une mutation qui pourrait lui conférer une protection immunitaire, selon une étude préliminaire. Une réinfection des personnes immunisées et une inefficacité des vaccins est redoutée.
Un "risque important" de réinfection et d’inefficacité des vaccins. C’est ce qui inquiète les scientifiques à propos du variant sud-africain du coronavirus. Baptisé 501Y.V2, ce variant détecté en Afrique du Sud en décembre 2020 est aujourd’hui présent dans 23 pays en Afrique, Europe, Asie, Océanie, Amérique du Nord et du Sud.
Sa particularité repose sur une mutation, appelée E484K. Elle agit sur la protéine Spike (ou protéine S), protéine de surface qui permet au virus de s’accrocher aux cellules cibles et d’y pénétrer. Problème : la mutation semble capable de diminuer la reconnaissance du virus par les anticorps, et donc sa neutralisation par le système immunitaire.
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Une réinfection possible
Pour mieux estimer ce risque, des chercheurs sud-africains ont confronté en laboratoire le variant 501Y.V2 à divers plasmas sanguins de patients guéris ayant déjà été infectés par l’ancien variant du virus. Ils détaillent leurs résultats dans une étude préliminaire rendue publique le 19 janvier 2021 sur le site BioRxiv - mais pas encore évaluée par d’autres scientifiques.
Le plasma contient les anticorps "neutralisants" fabriqués pendant la première infection et capables de reconnaître et de neutraliser le virus. Mais selon les chercheurs, le nouveau variant "est largement résistant aux anticorps neutralisants".
Autrement dit, "la plupart des individus infectés avec des souches précédentes du SARS-CoV-2 auront une réponse de neutralisation minimale ou non détectable contre le 501Y.V2", s’inquiètent les chercheurs. Les personnes déjà contaminées, "supposées avoir acquis un certain niveau d'immunité" pourraient donc ne pas être protégées contre ce nouveau variant et déclarer une réinfection.
Les vaccins inefficaces ?
Mais ce n’est pas tout. Cette mutation pourrait aussi avoir "des implications sur l'efficacité des vaccins contre le SARS-CoV-2 puisque les vaccins sont principalement basés sur une réponse immunitaire à la protéine Spike", insistent les chercheurs.
Ils soulignent donc le "besoin urgent" "d'identifier des cibles" moins sujettes aux mutations et de développer des plateformes pour adapter les vaccins.
Ce que les laboratoires ont d’ailleurs promis de faire, "en six semaines", assure par exemple BioNTech. Si les résultats de l’étude sud-africaine sont confirmés, un nouveau calendrier de production et de distribution de vaccins efficaces contre le 501Y.V2 devrait alors être mis en place.
"Pas une bonne nouvelle mais pas une surprise"
Pour le professeur en biochimie à l'université d'Oxford James Naismith, cité par l’organisme Science Media Centre, "ce n’est pas une bonne nouvelle mais ce n’est pas une surprise". Il ne faut selon lui "pas paniquer" mais poursuivre les recherches.
Principaux objectifs de ces recherches à mener : "évaluer le pouvoir neutralisant des anticorps générés par la vaccination contre les variants du virus" et "étudier la réponse immunitaire des individus infectés par les variants", avance de son côté le virologue Lawrence Young, de la Warwick Medical School.
Même problème pour les variants brésiliens ?
D’autant que l’inquiétude ne se limite pas au variant sud-africain puisque les deux variants brésiliens, dont celui identifié au Japon, portent également cette mutation E484K.
Ce n’est en revanche pas le cas du variant britannique, contre lequel le vaccin Pfizer/BioNTech serait bien efficace, selon deux études préliminaires publiées le 20 janvier.