Movember : le mois de la santé mentale des hommes
60 hommes se suicident chaque heure dans le monde. Depuis 2003, la campagne Movember, qui se tient tout le mois de novembre, sensibilise à la fois sur les cancers masculins et sur la santé mentale des hommes.
Cette année, l'objectif est de courir 60 km durant le mois du Movember, une course qui fait écho aux 60 hommes qui se suicident chaque heure dans le monde.
3 à 4 fois plus de suicides que les femmes
D'après l'Observatoire national du suicide, 9.300 suicides ont eu lieu en France en 2016, dont 75% chez les hommes.
"Les hommes se suicident 3 à 4 fois plus que les femmes en Occident pour plusieurs raisons, constate le Dr Marc Fillatre, psychiatre et président de l'Union nationale de prévention du suicide. "Ils sont jugés plus impulsifs, avec une culture qui consiste à garder les choses pour eux, à ne pas avoir de faiblesses et à ne pas parler des difficultés. Il y a d'une part, une difficulté à reconnaitre qu'ils ne vont pas bien, pour eux-mêmes et vis-à-vis des autres. D'autre part, ils ont du mal à aller parler et à accepter d'être aidés par un psychiatre."
Janie Houle est professeure de psychologie au Québec et auteure d'une étude sur le suicide chez les hommes, publiée en 2008. "Bien qu’il puisse sembler obsolète, le rôle masculin traditionnel demeure néanmoins très présent". L’adhésion au rôle masculin traditionnel augmentait le risque de commettre une tentative de suicide parce qu'il a un impact négatif sur le soutien social, la demande d’aide et l’état mental.
"Les techniques de suicide sont plus radicales chez les hommes, avec les armes à feu, les pendaisons, les précipitations ou encore les produits phytosanitaires chez les agriculteurs, reprend le Dr Fillatre. Les hommes ont davantage tendance avant le passage à l'acte, à utiliser beaucoup d'alcool, connu pour désinhiber ".
Des moyens de prévention spécifiques
"Le premier axe de prévention générale se trouve dans la façon d'éduquer les jeunes garçons et filles, avec une éducation moins genrée, qui permet de faire accepter la vulnérabilité des hommes", estime le Dr Marc Fillatre.
Le deuxième axe consiste à sortir culturellement de l'attitude "je ne me mêle pas des affaires des autres". Pour le psychiatre, les hommes n'ont souvent pas la facilité d'expression des femmes, notamment lorsqu'ils vont mal. Ce qui ne se manifestera pas forcément par une dépression mais par d'autres signes comme une addiction, un comportement à risque, une négligence dans l'aspect, des problèmes relationnels.
Parler pour soutenir
"Il faut faciliter la discussion et revenir à la charge assez régulièrement. Cela le dérangera mais il remarquera que l'on se préoccupe de lui, que l'on accepte l'idée qu'il n'aille pas bien et il gardera ce sentiment d'exister pour celle ou celui qui pose la question. C'est très soutenant."
Des campagnes de prévention axées sur les hommes seraient nécessaires, comme cela a pu être fait au Québec avec Buddy up qui pousse les hommes à prendre des nouvelles de leurs amis.
Les aides possibles
"Pour ceux qui vont le plus mal, c'est le corps sanitaire qui coordonne, en privilégiant au départ une prise en charge avec le médecin généraliste", conseille le Dr Fillatre. "Aller voir un psychiatre pour les hommes est souvent insupportable."
Quand ce n'est pas trop inquiétant, le psychiatre recommande à la personne la plus proche de prendre quotidiennement des nouvelles. L'entourage, comme la personne en difficulté, peuvent demander de l'aide au 3114 numéro national prévention suicide, pour trouver une réponse professionnelle adaptée 24 heures sur 24.
"Pour les plus jeunes, la maison des ados est un dispositif très intéressant et partout en France", conclut le Dr Fillatre.