Paul Ehrlich, le père de la chimiothérapie
Paul Ehrlich, scientifique allemand lauréat du Prix Nobel de médecine en 1908, est à l'origine d'une révolution de la pharmacie et du médicament. Il est en effet considéré comme le père de la chimiothérapie. Il ne s'agit pas là des traitements pour lutter contre le cancer, mais de toutes les substances chimiques utilisées pour combattre une maladie. Paul Ehrlich va ouvrir cette nouvelle voie dans la deuxième moitié du XIXe siècle. Portrait.
Dans les pharmacies hospitalières, pas de plantes ni d'herbes médicinales, c'est le règne de la chimie. C'est par l'assemblage de molécules que les médicaments prennent vie. Un savant mélange que l'on doit à Paul Ehrlich. "Jusqu'à la fin du XIXe siècle, toute la pharmacie était dominée par le règne végétal. On utilisait les plantes pour soigner les maladies. À partir de Paul Ehrlich et des élèves de Paul Ehrlich, on va progressivement introduire en thérapeutique des substances préparées par la main de l'homme dans des laboratoires de synthèse. C'est la chimiothérapie, ce sont les médicaments d'origine chimique", raconte François Chast, professeur de pharmacie.
Et la chimie, Paul Ehrlich l'a voit en couleurs. Les propriétés des colorants passionnent le scientifique allemand. Il comprend que ces substances ont des affinités avec les microbes et va s'en servir comme outils de diagnostic. Il crée ainsi la fuchsine, un colorant qui révèle la présence du bacille de Koch responsable de la tuberculose.
Si un colorant permet de diagnostiquer une maladie, peut-être pourrait-il aussi la combattre. Paul Ehrlich va appliquer cette intuition sur le trypanosome, un parasite à l'origine de la maladie du sommeil qui sévit en Afrique subsaharienne. "Paul Ehrlich a essayé de trouver différents composés chimiques qui permettaient de tuer le parasite. Pour cela, il a testé différents types de composés parmi toute une panoplie de produits chimiques. Et il a identifié deux produits : le trypan et le rouge trypan", se souvient Serge Bonnefoy chercheur à l'Institut Pasteur. Et en effet ces colorants ne vont pas se contenter de révéler le parasite, ils vont aussi le détruire.
Mais l'oeuvre majeure de Paul Ehrlich reste son combat contre la syphilis. Au début du XXe siècle, la maladie vénérienne est un véritable fléau et la découverte de la pénicilline encore lointaine. Avec son équipe, Paul Ehrlich se met à travailler sur l'atoxyl, un dérivé de l'arsenic pour transformer la molécule. Après 606 tentatives, il parvient enfin à créer le salvarsan. Et pour la première fois, une injection d'un médicament en intra-musculaire va permettre de guérir une maladie qui jusqu'à présent était incurable.
Le médicament de Paul Ehrlich a par la suite été abandonné, mais son héritage demeure. Parce qu'il constitue l'un des premiers médicaments de synthèse, il a ouvert la voie à toute la pharmacologie moderne.