Découverte de souches de listérioses hypervirulentes
Des souches hypervirulentes de bactéries, responsables de la listériose, une infection grave d'origine alimentaire, ont été mises en évidence par des chercheurs de l'Institut Pasteur, dont les travaux sont parus le 1er février.
Ces souches de bactéries plus agressives devraient être prises en considération dans la surveillance des listérioses, "qui représentent près de la moitié des décès par infections d'origine alimentaire dans les pays occidentaux", notent les chercheurs dont la revue spécialisée Nature Genetics publie les conclusions.
Responsable d'infections alimentaires pouvant être particulièrement graves, notamment chez les femmes enceintes et les personnes âgées, la bactérie Listeria monocytogenes a la particularité de proliférer à basse température, dans les réfrigérateurs notamment. Elle fait l'objet d'une surveillance dans de nombreux pays. En France, cette surveillance est assurée à l'Institut Pasteur (Paris) par le Centre national de référence (CNR) des Listeria, en lien avec l'Institut de Veille Sanitaire (InVS).
L'étude dirigée par Marc Lecuit (Institut Pasteur/Inserm/CNR) et Sylvain Brisse (Pasteur/CNRS) porte sur près de 7.000 souches de Listeria monocytogenes collectées depuis neuf ans dans le cadre de cette surveillance. Les souches provenaient de malades (2.584) et du contrôle des aliments (4.069).
"L'analyse des caractéristiques génétiques ("génotypage") de ces bactéries a révélé une grande diversité au sein de cette espèce bactérienne, avec une hypervirulence liée à un groupe de six gènes", indique à l'AFP Sylvain Brisse.
De plus, "l'analyse des données détaillées concernant plus de 800 patients montre qu'on décèle plus fréquemment ces souches hypervirulentes dans les infections humaines alors qu'elles sont plus rarement présentes dans les aliments", dit Marc Lecuit.
L'administration de ces souches à des rongeurs a confirmé l'hypervirulence de certaines d'entre elles avec une capacité particulière à s'attaquer au cerveau (SNC) et au foetus, alors que d'autres étaient très peu ou pas du tout virulentes, ajoutent les chercheurs. "Ces travaux peuvent en outre contribuer à mieux comprendre les neurolistérioses, notamment le mécanisme par lequel la bactérie réussit à s'attaquer au cerveau et tue 30 à 40% des malades atteints de cette forme de l'infection", ajoute-t-il.
On dénombre 400 infections à listeria par an en France (dont moins de 50 de femmes enceintes), responsables d'une centaine environ de morts, relève le chercheur.
L'atteinte foetale occasionne des morts in utero et des accouchements prématurés avec en général une atteinte du bébé (méningite).
Etude de référence : "Uncovering Listeria monocytogenes hypervirulence by harnessing its biodiversity", Nature Genetic, 2016, doi:10.1038/ng.3501
Les personnes les plus fragiles, immunodéprimées (traitées pour un cancer, un diabète ou une insuffisance rénale...) et surtout celles qui cumulent plusieurs pathologies sont plus susceptibles d'être infectées par des souches peu agressives (CC9 et CC121) alors que les souches hypervirulentes (CC1, CC2, CC4 et CC6) sévissent plus particulièrement chez des patients n'ayant pas ou très peu de pathologies affaiblissant les défenses de l'organisme.