Accoucher à domicile : pour qui et à quelles conditions ?
Accoucher à la maison, avec ses proches et sa sage-femme fait rêver certaines femmes. Mais cette pratique, encore très critiquée en France est peu développée.
Certains crient à l’hérésie, d’autres au contraire revendiquent ce droit à accoucher de manière naturelle au domicile. Quels que soient les avis, très peu d’informations circulent aujourd’hui sur cette possibilité.
Accoucher à domicile peut être un choix assumé. C'est celui qu’ont fait Léa et Florian, les heureux parents d’une petite Alizée de 3 mois. Pour eux l’accouchement à domicile, c’était la liberté de pouvoir donner naissance à leur enfant, accompagnés par une sage-femme chez eux, dans ce cocon sécurisant.
"Mon objectif c’était vraiment pendant l’accouchement d’écouter mon corps et de me laisser guider, de ne me poser aucune question, d’être à fond dans le lâcher prise. C’est une vraie liberté" explique Léa.
Accoucher à domicile, un risque
Les risques d'accoucher à la maison existent comme pour tout accouchement mais le syndicat des gynécologues dénonce cette pratique. Si vous êtes loin d’un hôpital, la prise en charge en cas de complication peut être retardée, que ce soit pour l’enfant ou pour la mère.
Le Dr Bertrand de Rochambeau, président du syndicat pointe surtout du doigt le risque d’hémorragie de la délivrance, qui reste la première cause de mortalité maternelle : "L’hémorragie de la délivrance aboutit à des décès qui, si vous n’êtes pas dans une structure médicalisée, sont inévitables.
Quand vous n’avez aucun accès aux soins médicaux c’est la catastrophe assurée pour la mère. C’est d’ailleurs pour ça qu’il n’y a pas une assurance professionnelle qui accepte d’assurer une sage femme ou un médecin pour ce type de risque !"
Une pratique pourtant légale
Il existe un paradoxe bien français. La loi Kouchner de 2002, autorise les femmes à choisir leurs professionnels de santé, le lieu où elles veulent accoucher et le type de soins qu’elles veulent recevoir.
Pourtant cette même loi exige en parallèle une obligation d’assurance, qui n‘est pas accordée aux sages-femmes. Le cadre législatif est favorable, l'accouchement est remboursé par l’Assurance Maladie, mais le contexte politique hostile n’encourage pas du tout cette pratique.
Accompagner ces accouchements
En France, sur 27 000 sages-femmes elles sont à peu près 65 à pratiquer l'accouchement à domicile. Accepter d’accompagner ces naissances, est un vrai engagement personnel, un choix militant.
Ces sages-femmes sont souvent stigmatisées dans le corps médical. Contrairement à ce qui peut parfois s'entendre, elles ne sont pas inconscientes, ce sont des professionnelles de santé qui évaluent elles aussi les risques de chaque grossesse avant d’accepter ou non de les accompagner.
"En premier lieu, je fais toujours un entretien pour déblayer le terrain, facteurs de risques dans les antécédents. Identifier aussi des problématiques logistiques est-ce que les gens habiteraient vraiment trop loin d’une maternité, dans une zone pas accessible. Médicalement je peux arrêter le suivi à tout moment si j’estime que je ne peux pas assurer leur sécurité.
Un exemple tout bête c’est l’hypertension qui est quand même très à risque d’hémorragies et de complications. De même que je n’accompagne pas de femmes qui ont eu une césarienne, parce qu’il y a un risque de rupture utérine infime, c’est une des rares urgences où il faut aller très très vite au bloc. Donc là on ne va pas prendre le risque, le but c’est quand même que les gens reçoivent les meilleurs soins possibles et parfois les meilleurs soins c’est l’hôpital !" explique Floriane Stauffer-Obrecht, sage-femme.
Une pratique répandue
En France, cette pratique reste anecdotique. L’accouchement programmé et accompagné à domicile, correspond à 1 000 naissances en 2019, soit 0,14 % des naissances. Dans d’autres pays industrialisés, elle est beaucoup plus acceptée. Aux Pays-Bas notamment, ce pourcentage atteint en moyenne 16% des naissances. Là-bas, comme en Belgique, en Espagne, au Royaume-Uni, en Autriche, en Suisse, en Italie... les sages-femmes sont assurées pour cette pratique.
Il est essentiel qu’une femme puisse choisir librement et de manière éclairée en mesurant les risques l’accouchement qui lui plait. Que ce soit à l’hôpital, en maison de naissance, à domicile, avec ou sans péridurale... C’est un combat nécessaire.