Fausse couche : "Je me suis vraiment trouvée livrée à moi-même"
Une proposition de loi est actuellement examinée pour mieux prendre en charge les femmes après une fausse couche, avec un accompagnement psychologique et un arrêt maladie. En attendant, les femmes sont souvent trop seules pour surmonter cette épreuve.
Une grossesse sur quatre se termine par une fausse couche lors du premier trimestre. Ces fausses couches précoces sont banales pour le corps médical, mais elles peuvent être très difficiles à vivre pour les femmes. Judith Aquien a vécu une fausse couche, à sept semaines de grossesse. Elle raconte cette épreuve douloureuse dans son livre Trois mois sous silence.
Aucun accompagnement psychologique
"Je suis allée voir le gynéco, les battements du cœur n’étaient pas présents. Je me suis vraiment trouvée livrée à moi-même. C’est lors d’une 2e consultation avec un autre gynéco que je lui ai demandé s'il pouvait me dire si c’était de ma faute ou pas ? Ce à quoi il m’a répondu que ça ne l'était pas. C'est ce que j’avais besoin d’entendre", témoigne-t-elle.
Dans son récit, Judith dénonce l’absence d’accompagnement des femmes confrontées à une fausse couche. "Je ne savais absolument pas ce à quoi j’allais pouvoir me préparer, et je sais que beaucoup de femmes reçoivent l’info selon laquelle ce serait comme de grosses règles. Ce n'est pas du tout ça. Ce sont des contractions, des saignements extrêmement abondants, c’est une forme de suite de couche donc c'est dur et c’est étonnant qu’on soit si peu préparées", confie Judith.
Un "congé fausse couche" pour les salariés
C'est pour mieux accompagner les femmes lors d’une fausse couche, y compris dans le milieu professionnel, que Judith en a fait un combat. Elle a créé une charte, signée par plus de 130 entreprises, dont un cabinet de conseil.
"La vie professionnelle et la vie privée ne sont pas hermétiques donc c’est important de pouvoir aider nos collaborateurs dans leurs difficultés professionnelles, mais aussi dans ce qu’ils peuvent rencontrer dans leur rôle d’individu de la société. On a vraiment cette ambition de libérer la parole donc de parler de la fausse-couche", explique Emmanuel Bardet, responsable expérience collaborateurs PwC France et Maghreb.
En cas de fausse couche, l’entreprise prévoit un congé de trois jours, avec maintien de salaire, pour la salariée ou le second parent, sans aucun justificatif médical. Le motif de l’arrêt reste confidentiel.
Un vrai impact sur la vie des femmes
C'est une réponse pour aider les femmes à traverser cette épreuve même lorsque la fausse couche est précoce. "Renvoyer une femme au travail dès le lendemain sous prétexte que ce n'est pas grand-chose, qu’elle va avoir un peu mal, elle prend du Doliprane, les saignements ça va passer, je trouve que c’est expéditif, et c’est vraiment ne pas tenir compte de ce qu’elle vit. Une fausse-couche mal accompagnée peut avoir un impact psychologique même pour la vie de la femme plus tard", déplore Frédérique Goualard, sage-femme à la maternité des Lilas.
Dans cette maternité, en cas de fausse-couche, un suivi psychologique est proposé aux patientes et un livret leur est remis pour les accompagner. C'est un dispositif qui est loin d’être généralisé en France.