Bébés secoués, un syndrome sous-estimé
Un bébé qui pleure et que l'on ne parvient pas à calmer... Une situation relativement banale, mais qui parfois tourne au drame. Quand l'adulte qui est chargé de ce bébé craque et le secoue violemment pour le faire taire, cela peut entraîner de graves lésions. Quelles sont les séquelles d'un tel traumatisme ?
Qu'est-ce que le syndrome du bébé secoué ?
Un enfant qui pleure et qu'on n'arrive pas à calmer… Une situation banale mais qui peut tourner au drame. Le syndrome du bébé secoué se définit par un traumatisme crânien chez le bébé, provoqué par un adulte en le secouant violemment.
Dans une grande majorité des cas, les enfants victimes sont âgés de moins de un an. Et s'il n'existe pas d'étude épidémiologique sur le sujet en France, on estime que des centaines d'enfants en seraient victimes (entre 2015 et 2017, entre 210 et 260 cas par an, d'après les données françaises). Les chiffres ont doublé durant la pandémie de covid-19 d'après une étude de 2021.
Le secouement ne peut pas être confondu avec un jeu. Il s'agit d'un acte de maltraitance, violent et volontaire souvent infligé par un adulte très proche de l'enfant qui ne supporte plus de l'entendre pleurer. La plupart du temps, l'adulte ne mesure pas les conséquences de son geste. Et pourtant…
Les conséquences du secouement sont gravissimes. Lorsque l'enfant est secoué, son cerveau cogne contre la boîte crânienne. En quelques secondes, le cerveau va subir des dommages importants. Un hématome se forme et entraîne des séquelles motrices et cognitives importantes. Dans les cas les plus graves, l'enfant meurt, ce qui arriverait dans un cas sur 5 et des séquelles neurologiques surviennent dans 3 cas sur 5. Il peut aussi tomber dans le coma ou être victime de convulsions.
Mais parfois, le syndrome du bébé secoué peut passer inaperçu car les signes cliniques sont plus subtils et seuls des examens médicaux spécifiques permettent d'établir le diagnostic.
Syndrome du bébé secoué : un diagnostic aux Urgences
Le diagnostic du syndrome du bébé secoué est difficile. Il nécessite plusieurs examens effectués à l'hôpital lorsque le bébé est conduit aux urgences.
Si l'équipe médicale estime que le secouement est probable, elle peut faire un signalement judiciaire. L'auteur du secouement lorsqu'il est identifié sera alors poursuivi.
Lorsqu'un bébé a été secoué, les signes cliniques pour les parents ou les médecins sont très difficiles à décrypter. Il peut même être compliqué au premier abord de faire la différence entre une simple gastro-entérite et un traumatisme crânien important lié à un secouement.
Quand l'équipe médicale n'arrive pas à expliquer la cause du malaise de l'enfant et qu'elle soupçonne un problème neurologique, le premier examen est un scanner de la tête. Il permet de rechercher la présence d'un hématome à l'intérieur du crâne.
Lorsque les médecins observent cet hématome sans pouvoir l'expliquer, ils envisagent un secouement, c'est-à-dire un traumatisme non accidentel. Pour compléter le diagnostic, un ophtalmologue pratique un examen de la rétine, un fond d'oeil. Il recherche des hémorragies rétiniennes caractéristiques en forme de petites perles. Elles sont localisées le long des vaisseaux. "Si une hémorragie sous-durale est associée à une hémorragie sur la rétine, on a la quasi certitude que le seul mécanisme qui peut donner ce saignement à la fois sous dural et dans l'oeil, c'est un traumatisme. Un traumatisme du type secouement extrêmement violent dans la plupart des cas", explique le Dr Philippe Meyer, anesthésiste-réanimateur.
Dernière étape, les médecins recherchent à l'aide de radios des fractures anciennes ou récentes. Autant d'indices qui pourraient témoigner de gestes de maltraitance sur l'enfant.
Comme il y a des suites judiciaires, l'enjeu de ces examens est important. D'autres examens sont donc parfois réalisés pour vérifier qu'il n'y a pas de maladies rares qui expliqueraient les hématomes ou des fractures (anomalies sanguines ou maladie des os de verre par exemple). Mais cela reste exceptionnel.
Syndrome du bébé secoué : une longue rééducation
La plupart du temps le syndrome du bébé secoué a des conséquences lourdes sur l'avenir de l'enfant. Le suivi et la prise en charge sont donc déterminants.
Le bébé secoué est un traumatisé crânien grave et les séquelles multiples sont souvent très lourdes. Des séquelles qui se révèlent progressivement, au fil des années, avec la croissance de l'enfant.
"Le cerveau sert à la motricité, au développement intellectuel, au développement du comportement… Et tout cela peut être atteint. Les séquelles dépendent de l'atteinte initiale. Mais elles peuvent aussi se développer au fur et à mesure du temps parce que l'enfant fait des apprentissages. S'il y a eu des lésions, des apprentissages ne vont pas se faire. Il y a donc des séquelles d'emblée apparentes et d'autres vont apparaître progressivement parce que des acquisitions attendues ne vont pas se faire", explique le Dr Anne Laurent-Vannier, médecin.
Un enfant naît avec environ 100 milliards de neurones. Et contrairement à la plupart des autres cellules, celles du foie ou de la peau par exemple, les neurones détruits ne se régénèrent pas. Mais ce n'est pas tout. Le cerveau d'un bébé secoué ne va pas pouvoir se structurer correctement pendant la croissance.
En région parisienne, beaucoup d'enfants secoués sont suivis à l'hôpital de Saint-Maurice. C'est le cas d'Axelle. Son père et son médecin ont accepté de témoigner pour permettre de comprendre l'étendue des séquelles d'un secouement.
Syndrome du bébé secoué : comment le prévenir ?
Les cas de bébés secoués s'observent dans tous les milieux sociaux. Les médecins ont pu identifier quelques facteurs de risque. Il y a la prématurité parce que ces enfants ont tendance à pleurer un peu plus que les bébés nés à terme, la gémellité parce qu'il est plus fatiguant de s'occuper de deux bébés que d'un seul ou encore l'isolement d'un parent qui n'a personne à qui passer la main.
Un bébé peut pleurer jusqu'à deux heures par jour, même s'il est propre, même s'il a mangé et même si vous lui avez fait un gros câlin. Alors quand on est à bout, les médecins ont un conseil : vérifier que l'enfant n'a pas de fièvre, puis poser le bébé sur le dos, dans son lit et quitter la pièce. Dans ce cas, il est moins dangereux pour le bébé de rester tout seul que d'être au contact d'un adulte fatigué et exaspéré...
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