Cystite interstitielle : souffrance et sous-diagnostic
La cystite interstitielle, aussi connue sous le nom de syndrome de la vessie douloureuse est une maladie inflammatoire chronique de la vessie. Elle se manifeste par de fréquentes envies d'uriner et de vives brûlures à la miction. Souvent confondue avec la cystite bactérienne, elle est largement sous-diagnostiquée laissant de nombreux patients dans la souffrance.
Imaginez ce que deviendrait votre vie si vous deviez aller plus 30 fois par jour aux toilettes. Imaginez encore que le seul fait d’uriner quelques gouttes puisse vous provoquer des brûlures insoutenables. Votre quotidien s’apparenterait alors à un calvaire et vous resteriez probablement cloitrés chez vous. Ce cauchemar, c'est celui que vivent chaque jour les patients atteints de cystite interstitielle.
Un véritable handicap social
Le syndrome de la vessie douloureuse génère des envies pressantes d’uriner, parfois toutes les 5 à 10 minutes. Les malades sont incapables de se retenir sous peine de douleurs aiguës ou de fuites urinaires. Dans ces conditions, difficile de garder un emploi ou d’avoir une vie sociale. Impossible d’aller au cinéma, de prendre le bus ou encore de faire ses courses.
Lidia souffre de cystite interstitielle depuis 6 ans. A cause de sa maladie elle a dû renoncer à son travail et ne sort presque plus. "Si je suis obligée de sortir, je dois planifier mon trajet à l’avance en fonction de la présence ou non de toilettes. Je repère les wc publics, les bistrots, les centres-commerciaux", explique-t-elle.
Cystite bactérienne, cystite interstitielle : quelle différence ?
La cystite interstitielle est souvent confondue avec la cystite commune, dite bactérienne, car les symptômes sont similaires. Pourtant à y regarder de plus près les deux maladies n’ont rien en commun, hormis leurs symptômes. A l’origine de la cystite commune, des bactéries (ou plus rarement un virus) qui se développent à l’intérieur de la vessie.
Certains antibiotiques sont alors capables de stopper cette prolifération pour mettre fin à l’infection. Dans le cadre de la cystite interstitielle il ne s’agit pas d’une infection mais d’une inflammation des parois de la vessie. Pas de bactérie responsable, donc aucune efficacité des traitements antibiotiques.
Une maladie sous-diagnostiquée
Beaucoup plus rare que sa cousine bactérienne, la cystite interstitielle paie le prix de son originalité. Méconnue du grand public, elle l’est aussi parfois des médecins qui peinent à en faire le diagnostic. On estime qu’un patient attend en moyenne cinq ans avant que sa maladie ne soit définitivement diagnostiquée.
Pourtant, certains examens permettent de reconnaître le syndrome de la vessie douloureuse. Le premier est une simple analyse d’urine. Si cette dernière ne révèle la présence d’aucune bactérie malgré des symptômes, il peut s’agir d’une cystite interstitielle. Pour confirmer ce diagnostic, une hydrodistension de la vessie devra être pratiquée. Cette intervention, réalisée sous anesthésie générale, vise à dilater la vessie avec du liquide afin d’observer les lésions de la paroi vésicale, typiques de la maladie.
Des causes mystérieuses
La cystite interstitielle touche majoritairement les femmes, à 90%. C’est à peu près la seule certitude que nous ayons sur cette maladie. Il n’existe aujourd’hui aucune étude scientifique capable de donner d’explication quant aux causes de cette maladie.
"Il semblerait que le syndrome de la vessie douloureuse soit le fruit d’une multiplicité de facteurs : l’alimentation, le stress, l’environnement, la sensibilité de la paroi vésicale", explique le Dr Frédérique Le Breton, médecin au service de neuro-urologie de l’hôpital Tenon. Certains médecins avancent même des hypothèses neurologiques qui devraient faire l’objet d’études plus poussées dans les prochaines années. Cette méconnaissance rend la maladie difficile à prévenir.
Il semblerait toutefois que les personnes sujettes aux cystites bactériennes récidivantes soient plus prédisposées à développer une cystite interstitielle. "Si tel est votre cas, buvez beaucoup d’eau et limitez votre consommation d’aliments acides, comme les sodas, les kiwis ou les oranges qui sont susceptibles d’irriter votre vessie", explique le Dr Lebreton.
Soulager les patients
Si la médecine n’est pas encore capable de guérir cette maladie, il existe néanmoins des moyens efficaces pour soulager les patients. La première est la neurostimulation transcutanée. Le principe est de calmer les douleurs en envoyant un léger courant électrique dans la vessie via des électrodes apposées sur le pubis et dans le bas du dos. Grâce à son action de dilatation de la vessie, l’hydrodistension permet de réduire pendant quelques semaines la fréquence des mictions.
Certains traitements médicaux peuvent également soulager les douleurs et limiter les envies d’uriner. Il peut s’agir d’anti-inflammatoires, d’antispasmodiques ou même d’antidépresseurs. Les patients devront toutefois changer de traitement régulièrement car avec le temps leur corps va développer une résistance au produit qui deviendra inefficace.