Cancer du rectum : la chirurgie incontournable
Le cancer du rectum a longtemps été synonyme d'anus artificiel. Lorsqu'il est localisé suffisamment haut, les techniques de chirurgie permettent désormais de relier le côlon au sphincter anal. Comment se passe l'intervention ? Y a-t-il des complications après l'opération ?
Qu'est-ce qu'un cancer du rectum ?
En France, 14.000 nouveaux cancers du rectum sont dépistés chaque année. Il s'agit du troisième cancer chez l'homme et le deuxième chez la femme. Dans 90% des cas, il survient après 50 ans. Le cancer de l'anus, lui, est plus rare. Il représente environ 3% des cancers digestifs. Même si les symptômes sont très voisins de ceux du cancer du rectum, les causes et les traitements sont en revanche très différents.
Le rectum est le segment terminal du tube digestif. Il fait suite au côlon sigmoïde. Le rectum comporte deux parties : le rectum pelvien, encore appelé ampoule rectale, qui mesure 12 à 15 cm et le rectum périnéal ou canal anal, qui mesure 3-4 cm. C'est au niveau du rectum périnéal que sont logés les sphincters repérables par le toucher rectal. C'est une région très vascularisée et très innervée. Le rectum sert de zone d'attente aux selles. Lorsqu'il est plein, il émet un signal au cerveau pour que celui-ci déclenche le déplacement des selles et leur expulsion par l'anus.
Le cancer du rectum se développe à partir des cellules qui tapissent la paroi interne du rectum. Le plus souvent ce cancer débute à partir d'un polype bénin (sorte de boule). Ces cellules peuvent se dérégler, elles se multiplient de façon anarchique pour devenir cancéreuses. Mais tous les polypes ne deviennent pas des cancers. Un polype dont le diamètre mesure plus d'un centimètre deviendra un cancer dans un cas sur quatre.
Le canal anal peut aussi être le siège d'un cancer, mais différent. Il ne doit pas être confondu avec le cancer du rectum. Cette zone est formée de différents types de cellules, chacun peut donner un cancer. Le plus fréquent est le cancer épidermoïde du canal anal. Ce cancer est presque toujours associé à la présence d'un virus papillomavirus (virus HPV). Ce virus est extrêmement répandu et transmis lors des rapports sexuels. Il peut être éliminé en quelques mois ou rester présent dans les cellules de l'anus. Tous les virus HPV ne sont pas cancérigènes, mais certains le sont plus que les autres. Ce sont aussi ces virus qui sont impliqués dans le cancer du col de l'utérus.
Dépister le cancer de l'anus
Il existe un nouvel examen pour dépister des lésions précancéreuses de l'anus : l'anuscopie de haute résolution. Il permet au médecin de repérer des zones à risque et de les traiter par infrarouge avant que ne se développent des tumeurs cancéreuses.
L'anuscopie à haute résolution permet d'observer avec un fort grossissement la structure des tissus à l'intérieur de l'anus. Le médecin peut ainsi voir de minuscules lésions provoquées par le virus. Et pour plus de précision, il utilise des colorants comme l'acide acétique qui blanchit la muqueuse atteinte. Pour être certain de son diagnostic, le médecin fait une biopsie de la zone suspecte, c'est-à-dire un prélèvement de tissu qui sera envoyé au laboratoire.
Le traitement suite à cet examen, c'est la suppression des tissus malades. L'intervention se fait sous anesthésie générale au bloc opératoire. Pour supprimer les lésions à risque, le médecin utilise une sonde à infrarouge. Après cette intervention, la muqueuse se reconstruit sans aucune séquelle. Ce traitement permet d'éviter des chirurgies plus agressives qui peuvent provoquer des rétrécissements de l'anus et des risques d'incontinence, d'où l'intérêt de faire ces examens.
Le cancer de l'anus se développe dans 90% des cas chez des personnes qui ont un papillomavirus persistant. Il est donc essentiel de suivre régulièrement cette population.
Le recours à la chirurgie
Pour diagnostiquer un cancer du rectum, on réalise en général dans un premier temps un Toucher Rectal (TR). Le médecin recherche alors un bourrelet saillant qui saigne au toucher. Ensuite, une rectoscopie, c'est-à-dire un examen du rectum par endoscopie, permet de confirmer la présence d'une tumeur.
Dès que le diagnostic du cancer du rectum est posé, il faut recourir à la chirurgie pour retirer la tumeur. Celle-ci est parfois associée à d'autres traitements, la radiothérapie et/ou la chimiothérapie, le laser ou coagulation. C'est en fonction de la gravité du cancer que le choix du traitement sera défini.
L'opération du cancer du rectum est une intervention très délicate car il faut disséquer les organes à l'intérieur du petit bassin, ou pelvis, un espace entre la cavité abdominale et le périnée, une zone très étroite. Certains chirurgiens utilisent un robot qui facilite l'intervention.
"Le traitement du cancer du rectum correspond à l'exérèse chirurgicale de la tumeur et surtout de toute la sphère ganglionnaire qu'il y a autour qu'on appelle le mésorectum. Et il faut rétablir la continuité en gardant l'anus", explique le Dr Alain Valverde, chirurgien digestif.
Pour réaliser cette intervention, le chirurgien utilise un robot. Trois bras manipulés à distance opèrent en passant par des petits trous dans l'abdomen. Et pour compléter le procédé, une double caméra permet au chirurgien de voir en trois dimensions l'intérieur de l'abdomen. Un deuxième chirurgien complète le dispositif. Utiliser un robot permet d'opérer à quatre mains en passant par l'intérieur de l'abdomen, dans des zones étroites et difficiles d'accès.
Le premier temps opératoire consiste à dégager le côlon de ses attaches pour accéder à la partie basse du ventre. Dans un deuxième temps, une fois la zone cible atteinte, le chirurgien sectionne et ferme le rectum avec des agrafes pour le rendre étanche. Le but : éviter que les bactéries intestinales contaminent l'abdomen et provoquent une infection grave. Le chirurgien peut ensuite extraire le côlon et le rectum de l'abdomen sans risque. Puis, le rectum est séparé du côlon et retiré. La pièce opératoire est alors envoyée au laboratoire pour analyse.
Le dernier temps de l'opération correspond à la remise en place du côlon en continuité avec l'anus. Le chirurgien replace le côlon dans l'abdomen et le raccorde à l'anus à l'aide de guides métalliques. Le côlon est agrafé et relié à l'anus. Suite à cette intervention, les patients gardent une stomie temporairement le temps que les cicatrices se ferment complètement.
Quelques troubles fonctionnels
Dans tous les cas, la chirurgie reste incontournable. Il est parfois nécessaire de relier provisoirement le côlon à la peau. On parle alors de stomie. Celle-ci est souvent définitive lorsque la tumeur est basse, donc, proche de l'anus. Environ 80.000 personnes ont un anus artificiel (une stomie) en France.
Lorsque le cancer est localisé relativement haut, les chirurgiens peuvent conserver le sphincter anal du malade, et le relier au côlon.
Après l'opération d'un cancer du rectum, certains patients vivent normalement et retrouvent la continuité naturelle du trajet digestif.
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