La tuberculose fait de la résistance en Grande-Bretagne
Contre la progression inquiétante des cas de tuberculose résistante aux traitements, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) lance aujourd’hui, mercredi 14 septembre 2011, un plan d’action en Europe. La France semble pour l’instant épargnée par ces souches, alors qu’outre-Manche, Londres est fortement touché par la maladie.
Cinq milliards de dollars pour en finir avec la tuberculose multirésistante. Voilà à quoi pourrait se résumer le plan d'action lancé, mercredi 14 septembre 2011, par l'OMS, en vue d'endiguer la progression des cas de tuberculose résistante aux traitements. Le principe est de mobiliser plus d'une centaine de pays, mais aussi les centres de recherche, et les ONG locales, autour du dépistage et des traitements de la maladie. En quatre ans, l'OMS espère ainsi éviter 263 000 cas et empêcher 120 000 décès.
Quand la tuberculose entre en résistance...
La tuberculose multirésistante est une forme particulièrement dangereuse de la maladie. Elle est due à des bacilles capables de résister aux deux antibiotiques majeurs utilisés, sur les quatre existants. "Pour soigner ces personnes victimes de ces souches résistantes", explique le Pr. Olivier Bouchaud, au service des maladies infectieuses à l'hôpital Avicennes à Paris, "il reste à notre disposition deux autres traitements, auxquels on rajoute d'autres médicaments pas toujours très efficaces, ou alors ayant des effets secondaires importants".
Le confort du traitement a ici son importance. Car les antibiotiques sont à prendre tous les jours, à des heures précises, et cela pendant six mois. Des contraintes auxquelles les malades ne se soumettent pas toujours, ou pas pendant toute la durée du traitement. Autant de comportements qui favorisent l'émergence de bacilles résistants aux médicaments. C'est ainsi que des cas de tuberculose multirésistante sont apparus en Europe, il y a maintenant plusieurs années.
... en Europe
Selon l'OMS, sur les 440 000 cas de tuberculose multirésistante évalués dans le monde, 81 000, soit 18 % au total, se produisent en Europe. Surtout en Russie et en Europe de l'Est. "Cela s'explique par la détérioration du système de santé après la chute de l'ex-Union soviétique en 1989", souligne le Pr. Olivier Bouchaud. "Les médicaments contre la maladie circulaient sur le marché, mais sans aucun contrôle médical. Les traitements ont été mal suivis. Des souches résistantes ont émergées." Autres régions concernées : les pays d'Afrique du Sud, pays en développement, où l'accès aux soins existent, mais de façon aléatoire.
... et à Londres
Londres enregistre le plus fort taux de tuberculose à l'Ouest de l'Europe. On recense 3 500 cas par an, soit une augmentation de 30 % ces dix dernières années. La capitale britannique accueille de nombreux immigrés issus de ces pays touchés par la tuberculose multirésistante. "Il est aussi possible que le système de santé actuel ne permette pas un repérage optimum des personnes malades, sachant que l'accès aux soins est là-bas couteux", nous confie Olivier Bouchaud.
Unité mobile de dépistage
Pour y remédier, Londres a essayé la mise en place d'une unité mobile de dépistage par radiographie, qui se rend dans les communautés les plus défavorisés, et les plus vulnérables, tels que les centres de traitements des drogués, d'accueil des personnes sans domicile fixe, etc.
Les volontaires ont droit à une radio, et sont ensuite suivis de près par des équipes médicales durant les six mois de traitements. Les résultats de cette étude publiés dans le British Medical Journal ce mercredi 14 septembre 2011, sont prometteurs. L'unité mobile a permis de dépister 16 tuberculeux par an depuis 2007, et de suivre plus de 100 malades pendant leurs traitements, chaque année.
La France épargnée
Pour l'instant, la France semble étrangement épargnée par ces cas de tuberculose multirésistante. Le Pr. Olivier Bouchaud confie que les cas sont relativement rares dans son service. "Mais la dégradation des conditions d'accès aux soins nous expose à l'émergence de souches multirésistantes", s'inquiète-t-il. "On imagine bien qu'un patient menacé d'expulsion par exemple, va peiner à suivre son traitement pendant six mois."
Quant au projet de l'OMS d'éliminer la tuberculose en Europe, d'ici 2050, en se limitant à moins d'un cas par million d'habitants, l'objectif fait sourire les médecins de l'hôpital public. Et semble inenvisageable. "Etant donnée la détérioration du tissu social et économique dans le monde, il y aura toujours des flux migratoires des pays moins industrialisés vers les pays plus riches. Par conséquent, il semble illusoire de croire que l'on peut supprimer la tuberculose en Europe."
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Ailleurs sur le web :
- Organisation Mondiale de la Santé (OMS)
Communiqué sur le plan d'action lancé par l'OMS.